Une petite année cinéma pour moi, notamment par rapport à l’an dernier, avec un ratio « films que j’ai pas aimés »/ »films que j’ai aimés », très légèrement en faveur de ces derniers (42 vs 47). Mais c’est la règle quand on voit beaucoup de nouveautés: la majorité de ce qui sort est loin d’être impérissable.
J’ai raté et pas pu rattraper des trucs potentiellement topables, tant pis (Le Jour d’après, Faute d’Amour, Bad Buzz, Certaines femmes entre autres)… Rien qu’hier, j’ai vu le magnifique Florida Project qui aurait eu tout sa place ici mais bon, comme je dis toujours, je vais pas faire mon top en mars non plus.
Le numéro 1 écrase la concurrence, pour les autres le classement ne veut trop rien dire mais ce sont les 9 films qui m’ont le plus ému, convaincu, fait rire, stimulé etc.
Les daubes, ici. Les films que j’ai pas aimés, ici. Les « oui », ici et les « OUI! » ici.
#10 L’Atelier
Avec le recul, je me dis que c’est bien mais que c’est presque trop bien. J’entends par là qu’il me manque quelque chose d’un peu déstabilisant sur la forme, quelque chose d’inattendu ou de sale ou d’imparfait, je sais pas, pour me convaincre totalement ou plutôt pour m’emporter totalement. Parce que convaincu je le suis : c’est d’une subtilité, d’une sensibilité et d’une intelligence remarquables.
#9 Thor : Ragnarok
Voilà, ça c’est sûr que c’est moins parfait… Mais justement ! J’en parle ici.
#8 Coco
Le film Toutes Les Larmes de Mon Corps de l’année. Au-delà de la manière et de l’intensité dont le film peut toucher la sensibilité de tout un chacun (entre nous: si ça te touche pas, je considère que t’es un nazi. Voilà, c’est dit, bisous), au-delà de l’inévitable aspect « film pour enfants » avec des gags plus ou moins drôles, de l’action, des courses poursuites, des seconds rôles cocasses etc (aspect brillamment traité d’ailleurs), c’est quand même dingue de voir un « film pour enfants » précisément, aborder de manière aussi frontale (j’allais écrire « brutale ») et subtile à la fois les questions du deuil, de la mémoire, de l’héritage, de la « trace » etc. Et puis j’ai trouvé ça visuellement splendide. Je crois que c’est la 1ère fois que je place un DA dans mes films de l’année, j’en suis le premier surpris, surtout après la déception de l’over-hypé et surestimé Vice Versa.
#7 Logan
Brutalité toujours. Hurt de Johnny Cash était utilisé dans la bande annonce et ça tombe sous le sens : c’est comme si le traitement appliqué par Rick Rubin à la musique du maître avait été également adopté pour le personnage de Wolverine. J’en parle ici.
#6 Une vie violente
Pas très aimable, des personnages pas vraiment sympathiques, des acteurs inconnus ou presque, des dialogues parfois peu audibles et des scènes parfois peu compréhensibles : Une vie violente se donne moins les moyens de trouver son public que Le sens de la fête. C’est cette rudesse qui m’a plu (insérer ici une comparaison avec le peuple et le paysage corses), cette intransigeance, tout autant que cette volonté de ne jamais juger les actes ou les paroles des personnages. Avec tout ça, c’est sûr que c’est pas le film le plus fun de l’année mais c’est remarquable.
#5 Logan Lucky
Le feelgood movie de l’année, mais pas que. J’en parle ici.
#4 Petit paysan
C’est un film qui me touche beaucoup parce qu’étant issu du milieu agricole et ayant grandi à la ferme, tous les films qui prennent ce cadre et abordent ses problématiques me touchent. Mais au-delà de ça, je trouve ce film excellent car ces problématiques précisément (le poids de la famille, le poids des normes d’hygiène, la pression financière, l’attachement aux animaux qu’on élève, le célibat etc.), il les aborde à travers un récit parfois étonnant et avec un ton à la fois grave et fantasque, drôle, émouvant, parfois un peu effrayant même. Y a un côté « premier film français » type qui est sans doute trop prévisible voire caricatural pour certains mais je sais pas, ça fonctionne ici pour moi. Sans doute parce qu’on est plus près de la fausse légèreté des Combattants que de la fausse gravité d’Ava (exemples pris un peu au hasard).
#3 Good Time
Plan large sur la ville. La caméra se rapproche d’un immeuble, et se rapproche encore, et encore, à tel point qu’elle finit par pénétrer dans une pièce (le bureau d’un expert-médecin). C’est ça Good Time: on accède dans les 1ères secondes au coeur de la ville, au coeur des personnages et de leurs actions et on restera à leur côté jusqu’à la toute fin, jusqu’aux toutes dernières secondes là aussi. Cette proximité, cette énergie dingue, cet enthousiasme à filmer, à raconter (le génial flashback du non moins génial Buddy Duress), et à le faire dans la rue avant tout, rappelle évidemment beaucoup le Nouvel Hollywood : mais il faudrait alors parler de « nouveau Nouvel Hollywood » tant le genre semble s’inventer sous nos yeux, indifférent à tout ce qui s’est fait précédemment. Sans doute le film de mon top 10 que j’ai déjà le plus envie de revoir.
#2 L’autre côté de l’espoir
Les films sortis en début d’année sont toujours les grands perdants des bilans de fin d’année et c’est parfois injuste : L’autre côté de l’espoir est un très beau Kaurismaki, peut-être pas son meilleur mais une belle prolongation de son oeuvre sur le fond et sur la forme (ces beaux aplats de couleur, cette lumière caractéristiques, sans compter le jeu atone, bressonien, des acteurs évidemment). Il y prolonge avec une vigueur étonnante son plaidoyer pour une Europe ouverte et bienveillante à l’égard des migrants et des laissés pour compte comme dans Le Havre, son précédent film. C’est drôle, c’est beau, c’est émouvant, c’est du grand Cinéma.
#1 Twin Peaks, the Return
Je sais pas si c’est 1 film de 18h, 18 films d’1h, une série traditionnelle, ce débat ne m’intéresse pas. Enfin, si je le classe dans mon top films (comme Les cahiers du cinéma notamment), c’est que je dois avoir ma petite idée je suppose.
Je sais surtout que si j’ai trouvé l’année cinéma relativement pauvre, c’est essentiellement parce que cette 3ème saison de Twin Peaks m’a complètement niqué une grande partie de ce que j’ai vu en salle: je n’ai rien vu qui arrive à la cheville de l’invention et de la puissance formelle de ce que David Lynch a créé cette année. Sans jamais laisser les sentiments (humour, effroi ou émotion) de côté. Avec en outre, et outre toutes les (multiples) fascinantes zones d’ombre qui subsistent encore, quelque chose d’un peu surnaturel, d’un peu magique et d’indéfinissable propre à cette merveilleuse forme d’art et contenu parfois dans une simple séquence, une simple apparition, une simple image qui fait que « le cinéma c’est ce qui rend la vie plus belle (mais aussi plus effrayante et plus joyeuse) que le cinéma ».