Fatigués de leurs fins de mois difficiles, trois jeunes sans avenir voient l’opportunité de gagner beaucoup d’argent en volant une mallette à un notable du Havre. Sans le savoir, ils viennent de braquer un secrétaire d’État corrompu et de voler l’argent d’une entreprise criminelle. Débute alors, une spirale qui les dépasse complètement. (Allociné)
Tiens si je parlais d’un film que j’ai aimé ? Oh ça va, pour une fois…
J’en parle parce qu’il m’a plu mais aussi parce qu’il est facile de passer à côté : parce que moins bien distribué que Blade Runner 2049 par exemple, parce que son titre hyper générique (mauvais titre, vraiment, même s’il prend son sens quand on voit le film), et parce que son affiche pas très lisible (là aussi, elle s’éclaire après visionnage mais pour les spectateurs qui choisissent quel film aller voir devant la façade du cinéma… Un truc qui m’a toujours interpellé d’ailleurs mais bon, apparemment y a plein de gens qui se disent « tiens si on allait au cinéma? » et qui décident de ce qu’ils vont aller voir une fois sur place).
C’est dommage parce que c’est vraiment bien. Je suis pas super convaincu par tout mais les réserves que je peux avoir participent en fait de la réussite du film: un trop plein scénaristique par exemple, qui frise la surchauffe mais se révèle surtout généreux, ajoutant à la frénésie et à l’absurde de cette nuit de folie; une direction d’acteurs un peu lâche qui donne en fait un côté série B. Et… c’est tout en fait. Money déroule par ailleurs sa mécanique de film (très) noir avec une science, une énergie, et forcément, une inéluctabilité qui forcent le respect et emportent l’adhésion.
On peut penser à plein de monde : les Coen pour l’enchaînement parfois improbable et absurde d’avanies, pour le côté effet boule de neige infernale et inarrêtable, De Palma pour un certain sens du baroque (le tableau final dans la maison de Louis-Do de Lencquesaing) mais, et ça n’est pas le moindre de ses charmes et de ses qualités, il renvoie surtout aux drames sociaux dont le cinéma français d’avant-guerre s’était fait une spécialité: l’action se déroule au Havre, riante cité s’il en est, et les 3 personnages principaux dont on peut dire sans trop s’avancer qu’ils sont en galère, voient simplement une opportunité de s’inventer des jours meilleurs.
On peut penser à plein de films et de réalisateurs mais à aucun en particulier, c’est aussi ça qui est chouette: Money est un genre de one shot, une grosse décharge d’adrénaline qui fonctionne de manière autonome et ne ressemble à rien de ce que le cinéma français produit en ce moment (y compris les productions à la marge type Rester vertical ou Petit paysan).
Y a vraiment un chouette côté série B au sens le plus noble du terme, dans le sens où le film investit un genre (le polar ou le film noir) qui lui autorise des choses, visuellement et dans le propos, un peu transgressives, qu’on n’imaginerait en tout cas jamais dans un film plus « huppé ». Je pense par exemple à la scène du bébé dans le train ou à la conclusion… j’allais la qualifier mais je voudrais pas spoiler.
Je m’arrête là: j’ai rédigé ce billet à la va-vite avant tout pour t’inciter à aller le voir ce weekend car il ne va pas jouer encore bien longtemps je suppose (il n’est resté qu’une semaine dans « mon » Gaumont). C’est bon, t’iras voir Blade Runner plus tard, il va rester à l’affiche pendant 2 mois.
Une mention quand même pour le casting wtf et impeccable (Anouk Grinberg ?!?!?!) et donc pour un Benoît Magimel à l’apparence physique complètement folle: le corps de son Paul Lederman dans Cloclo, la tête de Johnny Halliday. Je sais toujours pas s’il est génial ou s’il fait n’importe quoi mais je pourrais revoir le film rien que pour lui.