Enfin, après 2 voire 3 ans d’attente, il est venu, il est tous là le premier album de Lafayette.
Ca faisait longtemps que j’avais pas rédigé de billet relatif à l’actualité musicale, c’est l’occasion idéale.
Première surprise : on y retrouve les singles déjà parus, dont certains ont plus de 4 ans (Eros Automatique, La Glanda et le tout premier, les Dessous féminins, même s’il n’avait jamais été officiellement distribué et qui est ici présent dans une version remaniée).
Deuxième surprise : ça l’effectue. Je veux dire, malgré le décalage bien naturel qu’il pourrait y avoir entre des titres composés il y a plusieurs années et plus récemment, Les dessous féminins affiche une remarquable unité. S’il ne s’agissait pas d’un gros mot, on pourrait presque parler d’album concept. Je parlerais donc plutôt de « conte discographique » pour reprendre une terminologie plus rohmerienne qui sied bien mieux à Lafayette.
Ca démarre ainsi le plus logiquement du monde comme dans un film du cycle Comédies et proverbes ou dans un Conte, encore, par Une fille, un été (« au bord de la mer ») pour s’achever dans la mélancolique béatitude de La Glanda (« un été elle et moi, en sifflant la glanda »), qui, je le rappelle, est l’hymne officiel de Grande remise . Entre les deux, Lafayette « perd la boussolle », porte des Dessous féminins ou rêve d’Endless Summer. Des histoires de filles, toujours, parce qu’évidemment, quoi d’autre n’est-ce pas? Avec, pour continuer l’analogie rohmerienne, une même élégance lorsqu’il s’agit d’évoquer les tourments de l’âme ou le maelström des sentiments amoureux: détachement oui, mais de surface uniquement.
Troisième surprise, et non des moindres : c’est radical. Mais vraiment. Du genre à évoquer Michel Berger autant que les jeunes gens modernes auxquels il est régulièrement fait référence au sujet de Lafayette. Plus fort encore que le disque d’electro-pop élégant et précis qu’on était en droit d’attendre (et que j’attendais en tout cas pour ma part, ce qui m’aurait déjà comblé), Les dessous féminins parvient ainsi à une synthèse miraculeuse qui réunirait dans un même élan, artistes pointus et grand public, Berger, Daho ou Jacno donc mais aussi Phoenix, Burgalat (le sublime Instantané sur la banquise) ou Polnareff. Une hyper-variété pour reprendre à nouveau un terme qui lui fut appliqué à ses débuts, qui, selon toute logique, devrait lui valoir un succès populaire tout autant que d’estime. Mais ça évidemment…
Quatrième surprise enfin : si Lafayette se fait le chantre d’une mélancolie très française (pour reprendre là encore de manière un peu facile certes mais inévitable, le titre de l’un des fers de lance de l’album), il réussit néanmoins à s’extirper de références ou évocations 100% franco-françaises et à jeter un pont entre West Coast et côte Ouest, entre Malibu et Orouët, entre yacht rock et Rohmer (encore lui). Voir par exemple, et dans un album largement « synthétique » qui plus est, la guitare impromptue qui surgit au milieu de Décapotable et qui ferait rougir de plaisir Fleetwood Mac ou Hall & Oates.
Bon, je sais pas toi mais moi au bout du compte, j’appelle ça un genre de disque rêvé et de rêve, une utopie pop et romantique évoquée quasiment à chaque seconde de l’album et qui s’accomplit comme par miracle dans le même mouvement. Quand une œuvre te donne ce que tu attendais, et parvient dans le même temps à te surprendre, c’est peu dire que tes attentes sont comblées.