Ay, ay, ay, ay, canta y no llores

Puisque le Football est mort lundi à 19h50, vêtu d’un maillot blanc maculé de tâches triangulaires jaunasses-orangeasses-rougeasses,
Puisque désormais ça rigole plus (la compétition, la vraie, a enfin débuté),
et puisque lorsque le niveau s’élève, je préfère laisser la parole aux spécialistes (comme ceux de l’excellent Faute tactique, un exemple parmi d’autres),

je fais aujourd’hui un point commentateurs, autre marotte des footeux avec les maillots, les coupes de cheveux et, pour les plus faibles d’entre nous, les femmes de joueurs.

Grégoire Margotton – Bixente Lizarazu

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Le transfert surprise de l’Euro, puisqu’annoncé à peine un mois avant la compétition. On pensait Christian Jeanpierre en place pour un bon moment, on imaginait aussi Margotton lié « à vie » à Canal Plus (il faisait partie des rares qui n’avaient pas quitté le navire pour Bein sport) mais la direction de TF1 a dû se dire  que CJP commentant les matchs de l’EDF pour un Euro se déroulant en France, ça serait un peu too much.
Bon, je l’aime bien Margotton, c’est un mec cultivé, qui s’exprime bien et reste sobre même s’il a une tendance un peu agaçante à SEXCITERTOUTDUNCOUPCOMMEUNMALADEAVEC UNEVOIXUNPEUCHELOUQUIDESCENDDANSLESGRAVESSURLESMOMENTSCHAUDS. Puis à redescendre (et remonter jusqu’à son timbre naturel) comme si de rien n’était. Mais franchement, après CJP, c’est du velours. Il rend même presque supportable Lizarazu et sa propension très France 98 à constamment nous remémorer la grandeur de ses faits d’armes passés. Presque.

Christian Jeanpierre – Rudi Garcia

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De CJP, on a déjà tout dit. Son enthousiasme de ravi de la crèche  (« Ha ha, regardez Arsène, ce joueur a un sparadrap Mickey sur le front, c’est formidable! J’adore ces images ! »), sa passion pour les fun facts débiles (« Figurez-vous Bitch-and-thé, que Gregor Pistorniak possède une particularité des plus étonnantes : il boit l’urine du joueur qui partage sa chambre tous les soirs avant de se coucher ». Bon ok, mauvais exemple, ça serait plutôt génial d’entendre ça un jour), ses analyses proches du néant ( le désormais légendaire « corner intéressant »).
Privé du Graal du commentateur de football (les matchs de l’Equipe de France), en même temps que de son consultant habituel (Lizarazu donc mais aussi Wenger, débauché par Bein sport je crois) on lui a également attribué un nouveau partenaire : l’ancien entraîneur de Lille et de la Roma, Rudi Garcia. C’est toujours bien d’avoir un consultant entraîneur évidemment (un entraîneur qui ne soit pas Luis Fernandez je veux dire) : le mec explique les phases de jeu bien sûr mais parvient également à interpréter et/ou décrypter des situations parce qu’il connait les joueurs, leur psychologie, leurs réactions dans tel ou tel cas de figure. Là dessus, très bien le Rudi. Il me plaît. Mais bordel, qu’est-ce qu’il est bavard ! Il a des choses à dire et il les dit plutôt bien mais putain, heureusement pour nous parce qu’il s’arrête jamais le mec ! Un match, c’est aussi des temps morts, des silences, pour laisser entendre les tribunes, le jeu même, si je puis dire. Je pinaille parce que c’était une première pour lui je pense, et il est apparu très à l’aise mais ça m’a vraiment gêné. J’ai même senti CJP un peu agacé par moments, c’est un comble !

Christian Jeanpierre – Franck Leboeuf

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Grammaire/syntaxe/vocabulaire hasardeux + rien d’intéressant à dire + humour de merde + beaucoup trop à l’aise : lui, c’est Leboeuf.

Christophe Hutteau – Alain Boghossian

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Christophe Hutteau : pas vraiment d’opinion, le mec ne m’a ni choqué ni emballé. Il fait son boulot.
Étonnamment, j’ai trouvé Boghossian plutôt pas mal : à l’aise mais moins ramenard que ses collègues de France 98 (Lizarazu, Leboeuf, Desailly, Dugarry mais c’est normal: il n’était « que » remplaçant), prenant la parole à bon escient, livrant régulièrement des réflexions pertinentes. Ok, c’est pas Reynald Denoueix sur le plan de l’analyse du jeu mais ça va quoi. En revanche, cet accent tapenade-aïoli, c’est pas possible : « Soixanteu et dixième sélectiong pour JérAUme Bo-atengueu ». Le tue-le-foot absolu.

Benjamin Da Silva – Omar Da Fonseca

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Mon duo favori, et de loin. Marrant cette similarité dans leur nom; c’est un hasard bien sûr mais c’est marrant. La star, c’est évidemment Da Fonseca : c’est lui le plus bavard, lui qui fait le show et Da Silva semble parfaitement s’en accommoder. Ce dernier possède un truc rarement souligné quand on parle des commentateurs : une voix et un timbre très agréables, qu’il module parfaitement. Reposant. Mais Da Fonseca, je l’adore, vraiment. Il exemplifie à merveille ma thèse selon laquelle on s’en fout au final de la syntaxe, de la grammaire, du vocabulaire : ce qui compte, c’est d’avoir des choses intéressantes à dire. Non parce que lui, en ce qui concerne le vocabulaire, il invente carrément des mots à chaque match quand il ne trouve pas les bons (je rappelle que même s’il vit en France depuis très longtemps, il est argentin) ! Et à chaque fois, il sort des barbarismes très justes, très imagés, presque poétiques parfois, qui définissent parfaitement ce qu’on vient de voir et qu’il voulait transmettre. C’est fort ça. Et puis cet enthousiasme bien sûr, 100% sud-américain. C’est con mais il me colle le sourire à chaque fois. Son compère se marre régulièrement lui aussi, le chambre gentiment : les 2 font preuve d’une complicité qui paraît non feinte et qui fait plaisir à entendre.

et last but not least

Denis Balbir – Jean-Marc Ferreri

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Mon duo détesté, et de loin. Entre Balbir, le commentateur péremptoire qui crie « but!!! » à la moindre frappe et nous récite sa litanie de statistiques imprimées à la va-vite 1h avant la prise d’antenne, et Ferreri, le type tout aussi péremptoire qui va sans ciller sortir des conneries plus grosses que lui avec une assurance édifiante, mon cœur balance (c’est ballot: j’ai beau me creuser la tête, j’ai pas d’exemple qui me vient là. Mais il sort vraiment, tranquilou, sûr de lui, 2-3 grosses conneries facilement vérifiables par match).
En plus, mais ça ça me fait plutôt marrer, les 2 ont l’air de pas très bien s’entendre. Ça se manifeste par un non-dialogue permanent : chacun commente le match de son côté, personne ne rebondit jamais sur ce que l’autre vient de dire. A part, à de rares reprises, Ferreri, qui laisse à ce moment-là une porte ouverte, une invitation à l’approbation, à l’échange, que l’autre ignore toujours souverainement. Il me fait un peu de peine, du coup.

Hen Wlad fy Nhadau

Sentiments mitigés au sujet de la 3ème journée de poules : des confrontations décisives et excitantes parfois mais aussi moins de matchs (puisque les 4 équipes de la poule jouent en même temps afin de respecter un maximum d’équité) i.e. le début de la fin de la compétition i.e. le retour à la normale. Et pour couronner le tout, la semaine prochaine, c’est le finale de la saison 6 de Game of Thrones. Mais qu’est-ce qu’on va devenir nom de Dieu ?!?!

Groupe A

Suisse 0-0 France

37ème minute : Pogba s’accroche au maillot de Xhaka et le déchire (bis repetita après Sagna sur Mehmedi dans le 1er quart d’heure). Denis Balbir : « Va falloir revoir la qualité de la lessive (???)… voire même du textile ». Et arrêter de tirer sur leurs maillots, ça pourrait pas aider ? Ceci dit, on a vu sur la toute dernière action que les maillots n’étaient pas si fragiles que ça (gros ouf de soulagement au département conception de Puma) et que de toutes façons l’arbitre en avait rien à cirer #totemdimmunitejusquaupoteaux. Nom de Dieu de bordel de merde, cette équipe en bois va se retrouver en demis sans avoir jamais rencontré de véritable opposition, ça me gonfle !

Foutez-moi ça en taule!
Foutez-moi ça en taule!

Groupe B

Russie 0-3 Pays de Galles

Affiche sur laquelle je vais un peu m’attarder puisque j’ai eu la chance d’assister au match au Stadium de Toulouse.
Arrivés dès le samedi, les supporters gallois avaient déjà mis le feu au concert des Super Furry Animals le soir même. Le dimanche ils étaient un peu partout en ville (enfin, « partout »… Dans les bars quoi), à chanter (et boire) sans relâche. Pas vu de Russes en revanche, ou alors ils se cachaient. Sales rouges.
Au Stadium du coup, y avait vraiment pas photo : une bonne moitié je pense était galloise, contre un gros quart de virage pour les Russes. J’étais hyper bien placé : tribune centrale (côté buts gallois en 1ère mi-temps), suffisamment près de la pelouse pour être proche des joueurs, suffisamment haut pour bien voir le jeu. Impeccab’.

J'étais bien placé.
Hyper bien placé.

Côté match, je sais pas de quoi ça avait l’air à la télé mais y en a pas eu (de match) : les Gallois ont fait ce qu’ils ont voulu du début à la fin face à des Russes totalement apathiques (c’en était presque suspect). Très impressionné par l’activité de Joe Allen, la justesse d’Aaron Ramsey. Et par Gareth Bale du seigneur évidemment, la star de l’équipe. Impressionnant physiquement (i.e. : super bien gaulé le salaud), il a écrasé le match à chacune de ses courses et de ses prises de balle. Impressionnant, y a pas d’autre mots. Et puis un leader technique, un vrai, qui sait prendre le jeu à son compte, mais également s’appuyer et mettre en valeur ses coéquipiers.
Côté tribunes… Bah, c’était fantastique… J’étais pas dans le virage tout rouge mais néanmoins entouré de Gallois (quelques Russes étaient perdus dans ma zone, dont un avec un incroyable t-shirt à l’effigie de Poutine. Je voulais essayer de le choper sur une photo mais sa tronche à accomplir des basses œuvres dans les rues interlopes de Novossibirsk m’en a dissuadé) et les mecs ont mis le feu de la première à la dernière seconde. Sur les buts, fallait faire attention à soi quand même. Ambiance Buzzcocks 1977. Mais gentil : sur le 2ème but, mon voisin m’a pris dans ses bras et m’a claqué une grosse bise sur la joue.
Et ces chants bon sang… J’ai toujours voulu aller voir un mach de foot dans un stade anglais, je pense que c’est ce qui s’en rapprochait le plus.
Du coup je les connais tous maintenant : « Gimme hope Joe Allen » (sur l’air de Gimme hope Joanna), « There’s only one Gary Speed » (à la gloire de l’ancien grand joueur/sélectionneur qui s’est suicidé chez lui et sans raison apparente à seulement 42 ans; cf le chouette papier qui lui est consacré dans le So Foot spécial Euro 2016) et LE tube, repris à plusieurs reprises au cours du match:

« Please don’t take me home
Just don’t wanna go to work
Wanna stay here
Drink all the beer
Please don’t please don’t take me home »

Efficace.
Sans oublier l’hymne national évidemment, qui donne son titre à ce billet, repris une fois par mi-temps. Je suis pas très sensible aux symboles/démonstrations patriotiques ou nationalistes (euphémisme) mais putain… Frissons.
Soirée inoubliable, vraiment.

Groupe D

Croatie 2-1 Espagne

– Bon alors t’as le choix mon vieux. A gauche, c’est tout droit. Tu vas rencontrer des chatons, manger du caviar et à l’arrivée y a Charlize Theron. Elle t’attend. A droite en revanche c’est boueux, ça grimpe pas mal, y a rien à bouffer et il caille. A l’arrivée, y a Rossy de Palma. Ah oui j’oubliais : tu devras aussi porter ce maillot dégueulasse.
– Je vais réfléchir.
– Sérieux ?
– 2 secondes.
– Comme tu veux mais magne-toi.
– …
– Dépêche !
– Euh, je crois que je vais prendre à g…
– Trop tard : tu prends à droite, le mec au maillot Lustucru vient de te passer devant.

Groupe F

Hongrie 3-3 Portugal

Ce que j’aime pas non plus dans les 3èmes journées de poule, c’est qu’il faut faire un choix. J’aime pas faire des choix. Là j’ai donc opté pour cette affiche (l’autre était Islande 2-1 Autriche) et ma foi, je crois que c’était pas ma plus mauvaise décision. Quel match mes aïeux ! LE match pour l’instant, avec 20 minutes, à l’entame de la 2ème mi-temps, totalement folles (4 buts, 8 occasions par minute. De chaque côté). Les célébrations buteurs/supporters hongrois font toujours autant plaisir à voir. J’espère quand même qu’il n’y a pas trop de fachos dans leurs rangs…

Groupe E

Suède 0-1 Belgique

Isaksson, Kallstrom, Ibrahimovic: j’ai l’impression que la sélection suédoise n’a pas bougé depuis 25 ans. Note que ça s’est un peu senti au cours de cet Euro. Moins au cours de ce match, je le concède.

Allez, bye bye, tu me manqueras pas.
Allez, bye bye, tu me manqueras pas.

Tenu éloigné du niveau des pros, je reviens agile comme Bebeto

Guette ma technique
Je suis physique
Numéro 1 au class’ment des tcha-tcheurs.

Toutes les sélections ont joué 2 fois. On attaque aujourd’hui les derniers matchs de poule.

Groupe A

Roumanie 1-1 Suisse

Je me demandais : le surnom de Gerard Piqué, c’est « Shakiro ». Mais si c’est Shaqiri qui sortait avec Shakira, il pourrait pas avoir le même surnom, ça serait moins « drôle » non? Et puis Shaqiri de toutes façons, c’est presque le pluriel de « Shakiro ». Je me demandais ça.

France 2-0 Albanie

Pogba et Griezmann remplaçants à l’entame donc. Complètement guedin le DD : depuis qu’il doit mâcher sa viande avec des chicots, il en a plus rien à foutre de rien. Il est fort quand même le bougre, on a l’impression qu’il a changé son système uniquement pour être conforté dans son choix initial.
Bien aimé le maillot albanais, qui est leur maillot away, sobrement original. Dur pour eux, et pour la seconde fois…

Groupe B

Angleterre 2-1 Pays de Galles

Les mecs nous collent l’une des plus belles affiches du 1er tour un jeudi à 15h… Je sais bien qu’on peut pas contenter tout le monde, qu’il y a les hasards du tirage au sort, les impératifs télévisuels blablabla mais y avait pas moyen d’inverser avec Ukraine-Irlande du Nord par exemple? Et si c’est la télévision qui dicte sa loi, Angleterre-Pays de Galles, c’est vraiment moins intéressant qu’Allemagne-Pologne pour un prime time ? Tsssss… Bah du coup j’ai rien à en dire parce que j’étais au bureau et que j’ai pu le suivre qu’en pointillé.

Groupe C

Allemagne 0-0 Pologne

L’affiche préférée des profs d’Histoire, des humoristes pseudo-polémiques et des amateurs de Scrabble (« Bla-szczy-kows-ki. Voilà, mot compte triple: 864 points »). Vraiment pas mal cette équipe polonaise. Je crois même que c’est celle qui m’a le plus plu jusqu’ici avec la Croatie.
Chez les Allemands, un peu agacé par Toni Kroos: je l’adore hein, c’est pas le problème, c’est l’un des joueurs les plus classieux à l’heure actuelle. Mais si ces prestations avec le Real sont toujours satisfaisantes (Kroos, c’est le mec qui n’est JAMAIS mauvais), j’ai toujours le sentiment qu’il est un peu en dedans, qu’il pourrait donner davantage (Kroos, c’est le mec qui n’est JAMAIS décisif). Ce qu’il fait avec la Mannschaft, avec laquelle il crève l’écran à chaque prestation. A un moment, je crois que c’est Götze qui fait un centre en retrait un peu aveugle dans la surface, et Kroos arrive comme un mort de faim pour tenter de reprendre le ballon en le taclant. Je suis pas sûr que la position et le rôle dans l’équipe, un peu différents, expliquent tout… Hey Toni, j’aimerais te voir reprendre des ballons dans la surface adverse avec le Real aussi, merde !

Groupe E

Italie 1-0 Suède

C’est rigolo cette équipe italienne caricaturalement italienne mais faudrait pas que ça dure trop longtemps quand même.

Groupe D

République Tchèque 2-2 Croatie

Pendant 70 minutes je me suis régalé, vraiment et j’ai espéré encore plus fort que l’Espagne tape la Turquie ensuite, pensant que dans le cas contraire, ça serait vraiment coton de jouer sa qualification contre les Croates. Quels joueurs bordel… Ces mecs puent le foot, c’est incroyable. Et puis ils nous ont fait la spéciale Yougo : Modric qui sort à la 60ème comme s’il restait que 5 minutes et qu’ils menaient 4-0 (ok, il a préféré prévenir une blessure plus grave mais quand même), des supporters débiles qui se croient au stade Maksimir, un mental en mousse et hop, 2 buts de remontés. Mais c’est aussi pour ça qu’on les aime.

Perisic et sa carte de la Croatie. Qu'il a rasée.
Perisic et sa carte de la Croatie. Qu’il a rasée.

Espagne 3-0 Turquie

RE-GA-LADE. La cacamiseta Desigual contre la Croatie donc, puisque c’est cette dernière qui « recevra ».

Groupe E

Belgique 3-0 Irlande

Je me demande si les Belges ne sont pas tout simplement un peu nuls, en fait. Et c’est pas la branlée infligée à des Irlandais d’une faiblesse insigne qui me fera écrire le contraire. Sur le plan de l’expression collective, c’est d’une pauvreté… En tout cas j’ai complètement revu mon opinion sur cette sélection, qui faisait partie de mes favorites avant le début de la compétition.

Groupe F

Islande 1-1 Hongrie

Ca c’était vraiment une affiche de pervers… Du genre dont on ne retrouve le résumé que sur le darknet. Mais c’était pas mal, principalement en raison du public, très chaud et enthousiaste des 2 côtés, qui a su faire vivre le match.

Portugal 0-0 Autriche

Le Portugal, c’est un peu l’Espagne d’avant 2008, l’Espagne d’avant la gagne. Des individualités confirmées (on les connaît), des joueurs intéressants qui se révèlent à chaque nouvelle compétition internationale (André Gomes, William Carvalho ici), une grande qualité technique, de la cohésion, de la volonté… et aussi de la maladresse, de la malchance, des manques. Cette sélection a besoin d’un déclic et le problème c’est qu’on le sent pas venir.

Fratelli d’Italia, l’Itaaaaaaaaaliaaaaaaaaaa s’è deeeeeeeeeesta

Suite du débrief de l’Euro 2016 sur Grande remise au premier poteau. Toutes les équipes ont joué une fois.

Groupe D

Espagne 1-0 République Tchèque

Pas sûr que j’écrive beaucoup sur les matchs de l’Espagne, ce sont des matchs qui ont pour vertu essentielle d’anesthésier mon second degré et mon sens de l’humour. Voici donc, pour meubler, le maillot away de la Roja, une immondice probablement gerbée par un styliste cubiste de Desigual.

Non mais sans déconner.
Non mais sans déconner.

Groupe E

République d’Irlande 1-1 Suède

Dans les tribunes, le match qui sera cité en exemple à l’heure du bilan, l’anti Angleterre-Russie : d’un côté de beaux blonds propres et polis (les mecs semblent rangés en tribune, comme sur une étagère Billy), de l’autre de vilains roux à l’alcool joyeux, qui ont bien compris qu’il fallait faire le spectacle pour tenter de masquer l’inanité de leur équipe de foot. J’exagère un peu bien sûr, ils étaient pas si nuls que ça mais quand ton joker offensif se nomme Robbie Williams Keane, 76 ans, 482 sélections…

Belgique 0-2 Italie

Le défi du lundi c’était quand même d’arriver à caser l’épisode de Game of Thrones de la semaine au milieu de 3 matches. Comme dirait le héros de About a Boy de Nick Hornby, avec tout ça, je sais pas comment font les gens pour travailler (j’avais posé mon lundi, merci le Front Populaire).
Le fait du match, c’est le sort subi par la plus belle coupe afro du football international.

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Ouais, t’as fait une connerie là mon vieux.

Bon allez j’arrête de faire le malin: c’était LE match-frisson de ce début de compétition avec, comme d’habitude lorsqu’elle a une sélection faiblarde sur le papier, une Squadra Azzura incroyable d’unité, de volonté, d’abnégation et, au final, de qualité. Un exemple pour toutes les sélections mais particulièrement pour son adversaire du jour bien sûr, aux grandes individualités incapables ou presque d’une expression collective satisfaisante.
Enfin, dans ce Belgique-Italie en particulier, la preuve ultime que l’axiome  football offensif = de gauche / football défensif = de droite, ne tient pas une seule seconde. Le football de gauche, c’est définitivement le football défensif, qui fait appel aux vertus de sacrifice, de solidarité, d’organisation, de planification même. Le catenaccio sera le genre humain.

Groupe F

Autriche 0-2 Hongrie

Une affiche qui sentait bon la Mitteleuropa, Stefan Zweig, les monocles, le Vieux Monde et les valeurs surannées (oui, Sissi aussi). Un truc pour les dandys et les esthètes. Bon, on a pas atteint un tel degré de raffinement mais c’était une chouette confrontation. Et puis c’est très con mais j’adore, vraiment, quand un joueur va fêter son but avec les supporters. C’est une scène à laquelle on assiste de moins en moins, ça m’a fait très plaisir de la revoir.
Enfin, ce match m’intéressait pour le gardien hongrois, connu pour évoluer en bas de survêtement informe, ainsi que pour son grand âge pour un footballeur de haut niveau, 40 ans. Il y a dans le superbe bouquin que l’excellent Thibaud Leplat a consacré à Guardiola (Guardiola, éloge du style , après celui consacré à Mourinho), quelques lignes absolument magnifiques, sur ce point de bascule, crucial, bien connu de tous les amateurs de football qui se respectent, un instant tu et profondément intime, à partir duquel l’amateur de football donc, va nourrir une petite douleur sourde et diffuse, foncièrement mélancolique. Ce moment c’est celui qui voit ses joueurs favoris devenir irrémédiablement plus jeunes que lui. Avec ce moment s’envole un peu plus chaque année cette part d’identification bêta, de fantasme débile, mais essentiel encore, qui lui faisait pensait au fond que « ça serait encore possible de jouer finalement ». Thibaud Leplat non seulement met le doigt sur une caractéristique essentielle du fan de foot, sur un moment qui est celui d’une rupture définitive avec l’enfance, mais le fait de manière extrêmement fine et délicate.
Et donc voilà, cet Autriche-Hongrie m’a rappelé que j’avais 43 ans, que mes joueurs favoris étaient beaucoup plus jeunes que moi depuis bien longtemps mais que lui, Gabor Kiraly, avait « seulement » 40 ans.

Et en plus il est chauve.
Et en plus il est chauve.

Portugal 1-1 Islande

Une affiche qui sentait pas bon le poiscaille : bacalhau vs atlantshafsporskur. La morue quoi.
Une image, géniale, au cours de ce match : après le but de Nani, tous les joueurs portugais se retrouvent autour de lui pour le congratuler et célébrer l’ouverture du score. Joao Mario s’approche de la mêlée et, ne pouvant atteindre le principal intéressé, tend sa main vers Cristiano Ronaldo, en mode high five, tout en marquant un léger temps d’hésitation, jusqu’à ce que Son Altesse Sérénissime le tolère d’un hochement de tête, lui signifiant par là même son consentement: « mouais ok, vas y, tape m’en 5 toi aussi ». Génial.

Oh les champiooooooons, oooooooon est tous ensemble

Puisque c’est l’Euro
Puisqu’il a lieu en France
Puisqu’il faut varier les plaisirs
Et puisqu’il est plus facile et rapide d’écrire n’importe quoi sur du foot que des choses intelligentes sur Julieta ou Elle, j’ai décidé cette fois-ci de balancer mes réflexions sur chacun des matches que j’aurai maté. En somme, pendant un mois, Grande remise devient Grande remise du plat du pied.
Bon, on verra si j’arrive à m’y tenir parce que je compte en mater beaucoup.

Bilan du weekend :

Groupe A

France 2-1 Roumanie

Alors oui, c’était juste UN match, c’était juste la Roumanie mais ça faisait très longtemps que j’avais pas vu un joueur survoler les débats de cette façon. Chacune de ses interventions était décisive. En mode Zidane contre le Brésil en 2006 le Payet.
Big balls on la Dèche qui n’hésite pas à sortir ses 2 stars supposées (Griezmann et Pogba, bien contrariés tous les 2) pour laisser toute la place à l’homme du jour (Dimitri Payet donc), permettant également à ses 2 juniors de remettre en cause la hiérarchie supposée (Kingsley Ronald Coman ça va ? et Anthony David Martial Gayant, tous les deux bien en canes).
Défense über-lolesque quand même. Et ça n’était donc « que » la Roumanie.

"J'ai pas touchaõ"
« J’ai pas touchaõ« 

Albanie 0-1 Suisse

Christian Jean-Pierre aux commentaires nom de Dieu ! The C to the J to the P ! Pensais qu’il avait été viré moi. Il m’a pas manqué sur le match de la France, faut pas déconner mais je lui souhaitais pas le chômage non plus le pauvre. Seulement, vicieuse, la direction de TF1 lui a collé Rudi Garcia dans les pattes. Je l’aime bien Rudi Garcia, y compris pour des raisons extra-patronymiques mais il est bavard le bougre. Très bavard. On entendait plus que lui ! A la limite de la logorrhée même. Pauvre CJP… Il galérait avec les réponses mono-syllabiques d’Arsène Wenger, on lui colle son exact opposé. Next stop, Eurosport.

Groupe B

Pays de Galles 2-1 Slovaquie

Manifestement décidés à laisser leur empreinte sur la compétition, les Slovaques mettent la barre très haut, entre un maillot immonde et quelques mines moyennement kawaii qui n’auraient pas dépareillé les contingents de bad guys dans 24h Chrono.
Et ça s’est traduit sur le terrain par une vraie défense de bouchers, notamment de Skrtel. Incompréhensible qu’il ait pu terminer le match (il a seulement pris un jaune… à la 92ème minute !). Content donc pour le Pays de Galles et pour son magnifique public. Touchant aussi de voir la joie de Gareth Christian Bale de jour (oui, ça va être ça pendant un mois) au coup de sifflet final, comme s’il venait de remporter la Ligue des Champions.

Profession : défenseur central / équarrisseur de chatons mignons.
Martin Skretl, profession défenseur central / équarrisseur de chatons mignons.

Angleterre 1-1 Russie

Malgré Denis Balbir et Jean-Marc Ferreri aka la pire doublette de commentateurs à l’Ouest de Thierry Roland, un chouette mach, intense et plein d’allant. Quelle ambiance de dingo sur le but de l’Angleterre nom de Dieu ❤ Je trouve toujours cette sélection foireuse et surestimée (même si cette année…) mais bordel, on lui doit toujours des moments sublimes. Angleterre-Pays de Galles jeudi après-midi va être génial ! (tous en RTT).

Groupe D

Turquie-Croatie

Affiche silky smooth entre les bouillants turcs et les esthètes croates. Les Vrais savaient, ils étaient devant leur écran. Et… ils se sont un peu fait chier. Beaucoup d’intensité, d’engagement mais un jeu beaucoup trop hâché. Très content que Modric ait marqué, c’est mon jouôr préféré depuis le départ de Mesut Özil à Arsenal (comment t’as pu me faire ça Mesut?). Crochets, accélérations, jeu long, extérs : il a encore régalé le David Guetta des Balkans.

"Quelle belle image !"
« Quelle belle image ! »

A noter enfin qu’au Challenge Grande remise de la coupe de cheveux la plus dégueulasse, le croate Perisic a pris une longueur d’avance : en effet, le facétieux latéral s’est fait dessiner sur les tempes, d’un côté son numéro, le 4, et de l’autre, la carte de la Croatie. N’importe quoi.

Groupe C

Pologne 1-0 Irlande du Nord

Je suis allé voir Ma Loute en fait.

Ah ben non, je suis allé voir Ma loute en fait.

Allemagne 2-0 Ukraine

Les futurs champions d’Europe en rodage. Deutsche qualitat. Tellement carré, tellement allemand que j’ai rien à dire en fait.

Ce pays qui n’aime pas le foot – Joachim Barbier – critique

Suite de mes lectures footballistiques avec un billet sur cet ouvrage également signé par une plume régulière de So Foot, Joachim Barbier.

Dans Ce pays qui n’aime pas le foot, il réagit principalement à l’énorme polémique, quasiment l’affaire d’Etat, autour de l’Equipe de France lors de la coupe du Monde 2010. Polémique qui faisait elle-même suite à d’autres débats débiles autour du but entaché d’une main de Thierry Henry lors du match de qualification pour cette même coupe du monde, autour de la banderole anti-Chtis des supporters du PSG lors de la finale de la coup de France, autour de la Marseillaise sifflée au stade de France etc.

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Selon Joachim Barbier, ces « événements » qui n’en sont pas et qui auraient dû en tout cas être circonscrits à la seule sphère du football, ont constitué un prétexte en or pour les polémistes et éditorialistes à 2 balles, désireux d’illustrer le désormais proverbial « malaise de la société française » dont les footballeurs seraient les véritables furoncles, ou pour le moins des racailles, des caïds de banlieue, des sauvages etc etc etc. Alors qu’ils n’illustrent en réalité qu’une seule chose : la France ne comprend rien au foot. Ou plutôt, la France manque gravement de culture foot. Je partage évidemment à 100% cette thèse, comme tout bon footeux intégriste qui se respecte.

Alors il enchaîne les arguments le bougre, et ils ne manquent pas. Selon lui par exemple, il ne peut y avoir de réelle compréhension de la chose footbalistique en France puisque l’engouement national est né de la victoire en coupe du monde en 1998. Evénement tardif déjà mais surtout, événement trompeur puisqu’il s’agit un acte fondateur euphorique et victorieux. Or : « L’âme d’un stade se forge moins dans l’habitude des victoires que dans le désarroi des défaites ou la honte des déroutes. Les deux bâtissent un équilibre des souvenirs, des sentiments, et un jugement. On peut appeler ça de la culture ». Amen. Et Barbier de déplorer les sifflets qui parfois tombent des tribunes alors qu’une équipe mène au score mais ne fournit pas le spectacle auquel le prix du billet donne supposément droit. A noter que l’ouvrage a été écrit avant la reprise en mains du PSG par les Qataris…

De la même manière, Barbier explique que « pratiqué sérieusement, le football n’a rien à voir avec le fair-play. Il est lié à la haine, à la jalousie, à la vantardise, à l’irrespect et au plaisir sadique d’être témoin de la violence : en d’autres termes, c’est la guerre sans les tirs. » Ca peut sembler évident mais ça va mieux en le disant.
Ainsi, et pour citer l’architecte Rudy Riccioti, « les gens qui ne voient pas l’humour qui existe dans le football sont des gens à qui il manque une case de lecture politique, il leur manque une clé de lecture du monde ». Hell yeah.

Sur la « rivalité » rugby/football, le rugby brandissant en étendard ses sacro-saintes « valeurs »: « Le rugby est resté un sport de protestant car il prétend incarner l’idée de justice, d’honnêteté, de vérité au cœur des règles qui l’encadrent, et représente quelque part une proposition de stage de développement personnel ». D’où l’indiscipline chronique des pays méridionaux (France, Argentine, Italie), catholiques eux. Pas mal ça aussi non?

Et du coup, c’est logique, dans un pays qui n’aime le foot que lorsque ses favoris l’emportent au cours de grandes compétitions, « la faiblesse des revenus de la Ligue 1, marketing, droits TV, n’est pas une cause de son sous-développement mais une conséquence ». En effet, si les droits TV anglais explosent, c’est parce que Manchester United ou Liverpool sont à la base hyper prestigieux et intéressants d’un point de vue marketing pour les investisseurs. Bien vu ça aussi.

Joachim Barbier étaye en permanence ses arguments et ses assertions d’exemples précis et toujours éloquents.
Le problème c’est que même s’il est toujours pertinent, voire occasionnellement brillant, son ouvrage est extrêmement mal construit. En réalité, il n’est pour ainsi dire pas construit, c’est à dire qu’il n’a pas d’épine dorsale, hors sa thèse initiale (« la France ne comprend rien au foot »), et encore moins de déroulé autour de cette thèse. J’ai cité, à dessein, des phrases et des exemples un peu à la volée mais c’est précisément ce qu’est ce livre : une succession sans véritable liens entre eux, d’arguments, exemples, idées, souvent brillants certes mais qui donnent au final le sentiment que le livre a été écrit un peu à la va-vite, pour créer un contre-feu à des polémiques effectivement aberrantes. Si j’étais prof et que je devais le noter, je demanderais « où est le plan? »

Mais je mettrais quand même une assez bonne note : parce que ce qu’il dit est souvent brillant donc et parce qu’il le dit bien. Ca manque simplement un peu de rigueur et de travail. Merde, je parle vraiment comme un prof.

Clasico – Thibaud Leplat – critique

Le titre complet est Clasico, Barcelone/Real Madrid, La guerre des mondes.
Deuxième ouvrage de Thibaud Leplat dans ma série « foutchebol à lire », et pas des moindres évidemment : il était sur mes tablettes depuis longtemps, en tant que supporter madrilène, je ne pouvais pas passer à côté.

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Clasico, c’est donc l’histoire de ce qui constitue, dixit l’auteur lui-même, « la plus grande rivalité sportive du XXème siècle ».

Leplat construit son ouvrage très rigoureusement : il démarre avec ce qui a inspiré son désir d’écrire la dessus j’imagine, ou qui a déclenché l’acte, à savoir le climax de cette rivalité qui s’est incarné à la fois à travers les figures des 2 principaux protagonistes, José Mourinho d’un côté, Pep Guardiola de l’autre, et à travers les 4 confrontations survenues en 2 semaines au mois d’avril 2011 (championnat, finale de la Coupe du Roi, demie-finale de la Ligue des Champions). Il commence par ça et termine son bouquin par un récit plus détaillé du passage de Mourinho à Madrid, ce qui lui permet ainsi de boucler la boucle.

Au miyeu, il déroule la chronologie des dates et événements fondateurs de cet antagonisme ultime. Leplat raconte tout avec brio, avec un maximum d’objectivité (j’y reviendrai), en s’évertuant constamment de contextualiser et de prendre en compte les spécificités de chacune des parties.

L’occasion de définitivement combattre certains préjugés qui ont la vie dure :
– le Real, suppôt du franquisme : en réalité, c’est seulement lorsque le Real a commencé à tout péter que Franco y a vu l’opportunité d’une vitrine pour l’Espagne et pour son régime, ce n’est pas lui qui a « fait » le club. Leplat rappelle ainsi qu’après la victoire de Franco et durant une bonne décennie, c’est le Barca qui domine outrageusement la Liga et que ça ne dérange nullement le gouvernement central, au contraire (ça fait office de « dérivatif » pour les catalans).
– De même sur le transfert d’Alfredo Di Stefano, première grande figure du madridismo, que Franco aurait soit disant favorisé: c’est en réalité l’incompétence des dirigeants barcelonais, leur incroyable amateurisme, qui a conduit la saeta blanca à Madrid, alors que son 1er choix était effectivement le Barca. Episode encore aujourd’hui peu connu et passionnant.
– Idem sur la coupe d’Europe, LA compétition qui a fait du Real ce qu’il est : la première édition se fait sur invitation et le FC Barcelone, le club numéro de l’époque je le rappelle (début des années 50), est invité. Mais il décline cette invitation (au profit de… la coupe des villes de foire!), laissant de fait la place au Real. On connait la suite, c’est en Europe que se forge la légende madrilène.
– Le transfert de Luis Figo : ça c’est un épisode dont bizarrement j’ignorais les détails, alors que je l’ai vécu. Je savais seulement que le portugais aurait voulu poursuivre à Barcelone et qu’il a choisi Madrid pour une simple histoire de sous-sous dans la po-poche. Gros coup de pute de Florentino Perez là, je comprends qu’ils l’aient eu mauvaise les culés, hihi.

Ces épisodes là, les détracteurs du Real s’en servent encore pour étayer leur ressentiment, voire leur haine. Les barcelonais en premier bien sûr, qui ont pu cristalliser à n’en plus pouvoir. Ca m’énerve un peu cette méconnaissance de l’Histoire et des faits mais c’est ce qui constitue en grande partie le socle de cette rivalité géniale donc bon.

Thibaud Leplat revient également sur la genèse du Barca moderne : au début des années 70, lorsque le régime de Franco commence à vaciller et à laisser un peu de mou, le sentiment nationaliste et la catalanité du club s’affirment de plus en plus. La bascule se fait définitivement avec l’arrivée de Johan Cruyff dont le fils naît à Barcelone : il le prénomera Jordi, alors que le gouvernement franquiste interdisait les prénoms catalans…

Au final, même si certains clichés sont battus en brèche, c’est bien 2 mondes en constante opposition que l’auteur nous présente.
Extrait:

« A Barcelone, l’équipe est une prolongation des préoccupations de la société. A Madrid, c’est une avant-garde aristocratique. Les premiers croient en l’égalité, en l’effort collectif et en la construction d’une identité commune. Les autres croient en l’universel et en l’évangélisation footballistique globale. Madrid croit au talent, Barcelone en la méthode. Di Stefano, Raul, Butragueño, Ronaldo; les grands joueurs ont forgé la légende du Real, pas les entraîneurs. »

Une « avant-garde aristocratique ». Grande remise fucking like this.
Une opposition de tous les instants qui évidemment, n’empêche aucunement les 2 clubs de se rejoindre sur les structures financières, notamment ces 10 dernières années, alors que leur antagonisme, leur popularité et leur puissance n’ont peut-être jamais été aussi forts. Avec néanmoins une différence essentielle là encore. Pour vendre, le Real n’a besoin que de la victoire, au contraire de son ennemi:

« La particularité […] du Barça est d’avoir élaboré un discours identitaire fort. Pour vendre, il faut être aimé. Pour être aimé, il faut gagner en faisant plaisir.[…] Mais pour être aimé, il faut aussi savoir donner [à l’UNICEF NDA]. Le Barça c’est un projet identitaire dans lequel il y a Cruyff, la Masia [le centre de formation du club NDA], la Catalogne et le compromis social. C’est beau. Pour info, le maillot à la boutique du club, c’est 104 euros. »

J’aime ce petit taquet gratuit en fin de démonstration.
Car oui, Leplat est un madridista. En conclusion de son ouvrage, il se livre à un long entretien avc Jorge Valdano. Certes, ce dernier est connu pour sa mesure, son intelligence, son recul, et il peut aisément clamer son admiration pour le grand rival mais il est et sera toujours 100% dévoué au Real.
Il remet ainsi les choses à leur place lui aussi : oui, le Barca fait jouer les jeunes issus de son centre de formation, et c’est exceptionnel à ce niveau mais le centre de formation qui « sort » le plus de joueurs professionnels, c’est la Fabrica, celui du Real et de loin (le double). Simplement, ceux ci n’ont que rarement accès à l’équipe première, ils sont obligés de s’exiler dans d’autres clubs (ces dernières années, le Real a ainsi « laissé filer » Juan Mata, Alvaro Negredo, Roberto Soldado ou encore Alvaro Morata, qui cartonne à la Juve).
Il met également un terme aux préjugés idéologiques qui voudraient que le Real soit un club de droite et le Barça un club de gauche :

« Le Barça a eu Vazquez Montalban [célèbre romancier, poète et essayiste pro-indépendantiste et supporter du club NDA]. Madrid n’a pas eu de figure intellectuelle comparable. Celui qui a besoin d’élaborer tout un discours, c’est celui qui perd, pas celui qui gagne [et bim NDA]. Le Real Madrid gagnait sans avoir à fournir d’explications, sans trouver d’excuse pour créer un facteur identitaire. L’identité du Real, c’était le triomphe. Point. »

Barre, à la ligne.

En conclusion, ce qu’expliquent à merveille Jorge Valdano, Thibaud Leplat et son ouvrage Clasico, c’est que le Barça a toujours été dans la réactivité et a dû opposer une construction idéologique à la construction sportive de son rival.

Super bouquin, super lecture, que je conseille à tous les amateurs de foot, voire de sport, compte tenu de la place que les 2 clubs ont prise ces dernières années à tous les niveaux.

Le Cas Mourinho – Thibaud Leplat – critique

Là on franchit un palier par rapport aux bouquins dont j’ai parlé précédemment : Thibaud Leplat, c’est autre chose que le « footballeur masqué », qui qu’il soit, que Denis Chaumier, que Damien Degorre : j’ai rien contre ces derniers mais bon, disons qu’ils appartiennent à une catégorie de journalistes sportifs « traditionnels » un peu ringardisée par les gars de So Foot, dont Leplat fait partie.

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Une petite présentation de l’auteur donc : diplômé de philosophie, Thibaud Leplat est selon moi le meilleur journaliste foot actuel, avec Markus Kaufman. Ce dernier s’est spécialisé dans l’analyse tactique: il est très intelligent, analyse le jeu avec beaucoup de pertinence, écrit avec beaucoup de fluidité.
Leplat s’attache davantage à l’humain : érudit et littéraire, il a une approche plus intellectuelle du foot. Intellectuelle et littéraire là encore, presque poétique parfois. Mais attention : s’il cite Sfefan Zweig ou que son ouvrage prend pour modèle ou tout du moins point de départ Le cas Wagner de Nietzsche, jamais il ne verse dans la pédanterie, l’abus de citations/références, la sur-interprétation cosmique (coucou Chérif Ghemmour). Son style est simple, évident, à l’image de ses analyses, toujours uniques et accessibles à la fois. Je le trouve extrêmement brillant lui aussi. Les 2, Leplat et Kaufman, sont complémentaires, on ne fait guère mieux à l’heure actuelle sur la « planète football » comme on dit.

Dans Le cas Mourinho, il s’attache à suivre le parcours de l’entraîneur en s’appuyant sur les témoignages de quelques personnages clé, sur les nombreux ouvrages/interviews/déclarations déjà disponibles, et sur sa propre expérience personnelle :  il est correspondant à Madrid pour divers media (dont So Foot, donc) et a par conséquent pu approcher la bête lors de ses conférences de presse. Il précise en revanche d’emblée qu’il n’a jamais pu s’entretenir directement avec lui, ce qui place d’emblée sa biographie un peu à part puisqu’on pourrait par conséquent dire qu’elle n’en est pas vraiment une. Biographie.
Il aborde en effet le cas Mou sous un angle différent et un peu inattendu : non plus seulement, et comme on le fait le plus souvent, comme un meneur d’hommes hors du commun ou un tacticien de génie (ce qu’il n’est de toutes façons certainement pas, au sens où ne peut certainement pas le mettre au même niveau qu’un Guardiola, un Sacchi, un Bielsa). Il le dévoile en revanche en universitaire (il est LA le secret), bosseur, rat de bibliothèque, qui a révolutionné son métier en appliquant sa science des sciences humaines à une discipline qui jusque là n’abordait cet aspect que de manière relativement primaire. Un type qui n’avait pas de jambes mais des yeux hors du commun, et une capacité d’analyse et de synthèse hors normes : il a démarré en tant qu’observateur pour Bobby Robson, le légendaire coach anglais. Un type, en réalité, qui a diversifié son savoir, faisant pleinement sienne la maxime de l’un de ses mentors, Manuel Sergio : «Celui qui ne s’intéresse qu’au football, n’a rien compris au football».

Leplat adopte ensuite un schéma plus chronologique et passe en revue les divers faits d’armes de José.
Sur les pages consacrées au passage à Porto, qui ont fait de Mourinho l’entraîneur d’exception d’avant le personnage un peu grand-guignolesque qu’on connaît depuis son passage au Real, Leplat est vraiment génial. Il parvient, comme son sujet, à englober sa discipline sous un angle à la fois tactique, émotionnel, intellectuel, véritablement stimulant. Il y aborde les concepts de mouvement intentionnel, de planification anthropologique (lis le bouquin si tu veux en savoir plus), d’inséparabilité de la raison et des émotions (via l’ouvrage du neuroscientifique Antonio Damasio L’Erreur de Descartes: la raison des émotions). Il y explique les méthodes d’entraînement de Mourinho, le concept de « périodisation tactique » (là encore, c’est très bien et très simplement expliqué dans le bouquin). Il évoque, comme s’il parlait de quelque grimoire de magie noire, la « Bible », rédigée par le coach pendant sa retraite avant d’entraîner Porto, et qui contiendrait 600 exercices d’entrainements spécifiques. C’est passionnant.

Il revient aussi, bien sûr, sur quelques matches clés de la carrière du Mou, fait, de manière remarquable, le lien qui lit historiquement le Portugal à l’Angleterre, expliquant comment cette dernière ne pouvait être que LA destination suprême pour Mourinho.
Il évoque ensuite son passage à l’Inter Milan, son chef d’oeuvre selon lui (remettre au sommet de l’Europe une équipe qui puait la loose et composée de joueurs finalement assez moyens), initié par un chef d’œuvre de conférence de presse durant lequel José met tout le monde dans sa poche par le truchement de la simple et nonchalante utilisation d’un terme de dialecte milanais.

Puis, bien sûr, le passage à Madrid. Passage voué à l’échec dès le départ, par la simple nature, le caractère essentiel des deux parties : Le Real est un club qui place la présidence et les joueurs au dessus de tout, jamais l’entraîneur. Par conséquent, le besoin de suprématie, de reconnaissance, l’ego mais aussi l’irrévérence, l’iconoclasme dont Mourinho fait preuve au quotidien dans sa pratique, ne pouvaient pas s’accorder avec la valeur essentielle du club et se fondre dans une institution qui place ses valeurs au dessus de tout et de tout le monde.
Il évoque aussi bien sûr LE point de non retour ie le déboulonnage en règle du saint du madridisme, de toute l’Espagne, San Iker Casillas, suite aux incidents DU match où tout bascule (et qu’il évoque plus en détail dans un autre bouquin sur lequel je m’attarderai très prochainement) : le match retour de Supercoupe d’Espagne au cours du quel Mourinho fourre son doigt dans l’oeil de l’adjoint de Pep Guardiola, Tito Vilanova (« fourre son doigt dans l’oeil » au sens propre hein pour ceux qui n’auraient pas eu connaissance de cet incident). Leplat analyse et raconte tout cela à la perfection car comme il l’écrit lui-même, son héros (le héros de son bouquin), est dans son club à lui. C’est évidemment aussi pour ça que je l’apprécie autant, on va pas se mentir : Leplat est un madridista, un vrai, qui connait le club, l’institution, son histoire et son essence mieux que personne.
Extrait:

Le Real est la parfaite allégorie de ce complexe de supériorité (des madrilènes, NDA). Ici, on est fier et on répète toujours que le Real « est le plus grand club du XXème siècle », comme la FIFA l’a un jour décidé, comme si les temps allaient bientôt terminer et qu’il était urgent de dresser un bilan avant liquidation. Les autres existent mais ne comptent pas vraiment. Jorge Valdano me l’avait expliqué un jour: « Le Real Madrid a toujours eu besoin du triomphe pour renforcer sa légende. Il l’a d’ailleurs converti en sa principale valeur. » J’aime le Real pour cette idée complètement folle de vouloir toujours gagner, toujours être en haut, dépasser tout le reste, bref, d’être le centre de l’univers. Madrid n’a plus d’industrie, n’a pas d’autre beauté que la ferronnerie, et c’est la seule grande ville ibérique étrangère à la mer. Madrid était une anomalie sur la carte. Elle est devenue le nombril de la Péninsule. Le Real est sa couronne.

Bon, toujours est-il qu’à ce moment-là, après les incidents du match retour de Supercoupe d’Espagne donc, Mourinho commence à comprendre, ou se persuade, que ses 3 préceptes essentiels (loyauté, intensité et subversion), ne trouvent plus d’écho dans son vestiaire. Casillas de son côté a compris que son entraîneur et son obsession barcelonaise étaient allé beaucoup trop loin. C’est ce moment, devenu quasiment mythique depuis pour les espagnols, où il prend son téléphone pour appeler Puyol et Xavi afin de s’excuser du comportement des joueurs madrilènes et de leur entraîneur, « sauvant » par là même l’unité de la sélection nationale. Mourinho ne lui pardonnera jamais cet acte de rébellion.

Ces pages là sont passionnantes et finissent de donner un vernis à la fois épique et meta-physique à la carrière pourtant loin d’être finie et effectivement déjà très riche, de Mourinho.
Disons, pour synthétiser et conclure, que Le cas Mourinho, c’est la rencontre idéale entre un personnage passionnant et une plume et un esprit remarquables.
Lecture vivement conseillée donc.

Je suis le footballeur masqué – critique

LE bouquin évènement, celui qui balance, qui dénonce, qui fait tout péter, qu’au jour d’aujourd’hui on s’arrache dans le milieu footballistico-footballistique des professionnels de la profession.

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Si les révélations ne sont finalement pas si fracassantes, c’est le style qui détonne et qui fait de ce livre un objet effectivement très intéressant.
Qui suit un minimum le foot sait bien en effet que les principaux acteurs, les joueurs, sont de plus en plus obnubilés par l’argent, leur apparence, le sexe, un mode de vie un peu gangsta comme le résume lui-même l’auteur. Alors bien sûr on retrouve tout cela: les soirées quasi orgiaques à Paris (les « provinciaux », joueurs des clubs hors PSG attendent impatiemment le match au Parc des Princes pour cette seule raison), les fringues et looks improbables, les concours de la plus grosse bite voiture dans le vestiaire. Mais aussi le jeu qui prime, malgré tout, et remet les choses et surtout les joueurs à leur place, les primes justement, et les salaires de ces mêmes joueurs (objets de discussions et tensions incessantes dans le vestiaire), les magouilles ridicules de certains agents pour faire monter la côte de leurs protégés pendant le mercato, les entraîneurs compétents, Luis Fernandez les incompétents, ceux qui savent se fondre dans  un groupe pour mieux le mener, ceux qui se placent en dehors du groupe et donc échouent (il cite Laurent Fournier ou encore Paul Le Guen) etc etc.
Extrait:
(sur le professionnalisme)

Il n’y a qu’en France où ça ne se passe pas comme ça (NDA ie les joueurs n’arrivent jamais en retard aux entraînements). En France on n’a pas inculqué ça aux joueurs. C’est ton boulot d’arriver à l’heure. J’ai connu un coach qui avait instauré un truc. Il y avait un papier et tu pointais. Dès que tu arrivais, tu signais le papier. Et à 9h30 tapantes, il sortait et retirait le papier. Celui qui n’avait pas signé était en retard. C’était pour inculquer le respect. Dans cette équipe, il y avait quand même des joueurs d’expérience. Et le vrai pro, il se pointe pas à 9h25 pour dire qu’il est à l’heure. Il arrive à 9h. Et il bosse déjà, ou il fait des soins.

Combien de mecs j’ai vus ne pas faire ces efforts-là… Le plus fou, c’est quand tu vois les gars arriver à l’arrache à 9h29. Bon d’accord, ils sont à l’heure mais t’as envie de leur dire: « Tu ne veux pas arriver une fois un quart d’heure ou vingt minutes plus tôt? Tu fais quoi? Tu attends 9h20 pour partir de chez toi? » Pense à tous ceux qui sont au boulot depuis 8h. Toi, c’est 9h30. Ca va mec, tu as eu le temps de dormir, non?

Ce qui tranche donc, c’est la façon dont le footballeur masqué parle de son quotidien et de son univers : de manière assez crue, pour faire court. Phrases courtes, directes, proximité, familiarité même, le style détonne clairement. Comme il le dit lui-même, il a l’impression de lire des contes de Noël lorsqu’il lit des biographies de sportifs : il a pour objectif de rompre avec ce qu’il considère comme une farce. Et il y parvient sans mal.

« Il ». Mais qui, ‘il »?
C’est évidemment là l’autre intérêt de ce bouquin : la recherche de l’identité de ce footballeur masqué, joueur encore en activité ou très récemment retraité. Même s’il a démenti et qu’il continuera certainement de le faire jusqu’à ce qu’il considère lui-même qu’il y a prescription, ma conviction est qu’il s’agit, comme il a régulièrement été suggéré, d’Edouard Cissé.

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Footballeur modeste mais solide qui n’a jamais réellement brillé mais encore moins déçu, mec plus malin, cultivé et stylé que la moyenne de ses congénères, footballeur « So Foot » éminemment sympathique donc (au même titre, chacun dans un style différent, qu’un Ludovic Obraniak, un Tony Vairelles, un Vikash Dhorasoo ou un Rodéric Filippi pour donner un des derniers exemples en date), il est en effet celui qui, comme son doppleganger littéraire, est passé aussi bien par l’Angleterre que par le PSG des années chaotiques (pré-QSG) ou le Marseille des années Deschamps (qu’il encense d’ailleurs).
Il essaie bien de brouiller les pistes en évoquant des expériences qui ne figurent pas dans son CV (en Russie par exemple) ou en parlant, et balançant même gentiment sur… Edouard Cissé (qu’il traite  de bon élève un peu fayot), il relate très probablement des anecdotes racontées par d’autres footballeurs (Jérôme Rothen est à plusieurs reprises expressément cité mais on peut également penser à Vikash Dhorasoo, encore lui) mais je ne vois pas comment il pourrait ne pas s’agir de lui, trop d’éléments concordent.

Mais finalement, peu importe : ce petit jeu de pistes est sans doute inévitable mais Je suis le footballeur masqué constitue un récit suffisamment alerte et fort en anecdotes croustillantes, doté d’un recul et d’un point de vue suffisamment forts, pour que l’enquête que tout un chacun est tenté de mener se révèle au final accessoire.
Chouette lecture donc, que je conseille : ça se lit tout seul, et très vite.

Foutchebol à lire

Malgré ma passion pour le foot, ce n’est que très récemment que je me suis mis à lire des ouvrages qui lui sont consacrés. Voici quelques notes sur quelques uns d’entre eux, pas les plus intéressants. D’autres suivront assez rapidement, sur des bouquins plus stimulants.

Michel Platini – Parlons Football – entretiens avec Gérard Ernault

Emprunté, je te le jure, juste avant que ça chie dans la colle pour « oui Michel! oui Michel! ». Mais c’est marrant de l’avoir lu précisément en plein (énième) scandale de la FIFA parce que ce bouquin n’est pas du tout l’occasion pour Michou d’évoquer sa carrière. Ou presque pas. Il s’agit plutôt de broder autour de ce que représente pour lui le football, le jeu de football au sens théorique s’entend, ses règles, les questions de l’arbitrage, de la video, du fair-play financier, des instances internationales etc. C’est ni plus ni moins qu’un programme de campagne donc. Oups.

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Extrait:

– Et dans cette ostentation, ce tralala, cet argent, cette indécence à la louche, croyez-vous qu’il peut vivre! C’en est au point que croisant le carnaval du football – sauf celui d’un été brésilien -, de plus en plus de passants cherchent à changer de trottoir.
-Le coup du mépris, je veux bien que vous me le fassiez pour le compte de la France des mauvais jours et des mauvais coucheurs. Mais ailleurs, détrompez-vous, le football n’est pas tant regardé de travers. Même s’il ne se présente pas, en toutes circonstances, sous les allures d’un enfant du Bon Dieu.

Comment qu’il cause bien mon Michel… On croirait pas comme ça hein?
Bon, tu l’auras compris: c’est insupportable. 400 pages comme ça. Quatre. Cents. Putain. De pages. Gérard Ernault a sans doute été un excellent directeur de la rédaction de L’Equipe et de France Football, à une époque où ces 2 titres signifiaient encore quelque chose (il est par ailleurs un excellent géniteur puisque celui de Christophe Ernault aka Alister ak Mr Schnock) mais nom de Dieu, qu’est-ce qu’il écrit mal… Je veux bien qu’il cherche à échapper au conformisme et aux balises des interviews habituelles, qu’il essaie d’élever le débat et son interlocuteur par la même occasion, qu’il artificialise sciemment et exagérément leurs échanges mais c’est tout simplement insupportable. Et pourtant, Dieu sait si Mich-Mich peut-être passionnant en interview.

Tous les chemins mènent à Rome autobiographie, avec Denis Chaumier

Il s’agit donc de l’autobiographie de Rudi Garcia, actuel coach de la Roma. Chopée un peu par hasard, parce qu’elle était disponible à la médiathèque, parce que j’aime bien ce mec, franc et passionné, et que ça m’a fait plaisir qu’il soit nommé à la tête de l’un des clubs les plus classes du monde (top 5 des clubs les plus classes du monde: 1. Milan AC 2. AS Roma 3. Ajax Amsterdam 4 Liverpool FC 5. Girondins de Bordeaux; le Real est évidemment hors catégorie; le Barca inéligible dans ce top).

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Comme son titre l’indique, le bouquin s’attache plus particulièrement à relater comment Rudi Garcia, joueur moyen (mais néanmoins professionnel en 1ère division, à Lille ou Caen notamment) dont la carrière a été stoppée net à 28 ans seulement en raison d’une blessure, a pu se retrouver, à sa propre surprise quand même, à la tête d’un des plus grands clubs de l’un des plus grands championnats du monde (l’AS Rome donc). Il a bossé le Rudi, il a la gnaque, il a de la qualité, c’est un bon entraînôr, il est là, tac tac, il propose, il est là, c’est un bon entraînôr.
Bon, tout ça pour dire que c’est pas désagréable à lire mais c’est pas non plus passionnant : le mec n’est ni un génie tactique à la Sacchi, ni un théoricien-intellectuel du football à la Valdano, ni un leader d’exception à la Mourinho ou Ferguson. Niveau palmarès, il a « seulement » fait le doublé coupe-championnat avec Lille. Il est encore très jeune dans le métier, la nécessité de ce bouquin n’apparaît pas des plus évidentes. Mais ça se lit gentiment.
Ah si, un truc quand même: il raconte qu’il s’est fait enfler par Bernard Tapie, qui lui a proposé d’être coach de l’OM lors de son retour sur la Canebière au début des années 2000, et puis finalement non, sans plus d’explications: Garcia apprend sur l’autoroute qui le mène à Marseille pour signer son contrat que ça ne se fera pas. Ah ben dis donc ça alors, se faire trimballer comme ça par un type comme Bernard Tapie, c’est quand même étonnant.

La bande à Deschamps – Damien Degorre et Raphaël Raymond

Ca c’est génial. Un bouquin, donc, sur une équipe qui n’a non seulement rien gagné mais dont les principaux faits d’armes se résument à une qualification à l’arrachée pour une coupe du monde et à un quart de finale au cours de cette même coupe du monde. Ouaaaaaaaaaaiiiiiiiis… « Naissance d’une équipe », ok, mais là c’est carrément un embryon. Et puis surtout ils auront pas l’air cons les mecs si l’EDF ne vas pas au minimum en demie-finale du prochain Euro…

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On se demande donc très vite non pas pourquoi j’ai emprunté cette bouse, parce que j’ai très honnêtement pas la réponse, mais comment l’idée d’un tel bouquin peut germer dans la tête de ses auteurs. Et on comprend très vite après s’être posé la question de quoi il s’agit, devant l’absence de point de vue, de style, de fond, d’infos croustillantes à défaut (bah oui, c’est pour ça qu’on lit des bouquins de foot non? Pour les secrets de vestiaire ou pour une analyse théorique et intellectuelle, l’un ou l’autre) : La bande à Deschamps est simplement un outil de propagande de la FFF, pour la FFF (Noël Le Graët y apparaît comme celui qui a remis de l’ordre dans la maison après la calamiteuse parenthèse Escalettes), pour son sélectionneur si humble et si fan de Michel Sardou ainsi que pour ces Bleus enfin aimables, enfin disciplinés, enfin polis, enfin sans casques sur les oreilles, enfin qui descendent du bus. A une sextape près, ça a failli marcher. Bon, je l’ai lu en diagonale en 2 soirées parce que faut quand même pas déconner.