So Foot – Hors série Best of Tactique

L’achat du So Foot mensuel fait partie de mes petits plaisirs. « Grands », pour être totalement honnête. D’ailleurs je me suis toujours pas abonné après toutes ces années (je suis lecteur depuis le numéro 5) car je trouve plus jouissif d’aller l’acheter chez le buraliste que de le recevoir dans ma boîte aux lettres. Et le soir venu, se mettre au lit pour bouquiner le dernier So Foot, mmmmmmh, c’est bon ça.
Au-delà de cette évocation personnelle, je considère que ce magazine a révolutionné non seulement la presse sportive, mais la presse tout court comme ont pu le faire Les Inrockuptibles dans les années 90. J’ai hâte de découvrir leur magazine de société, So Ciety, prévu pour ce printemps.

Chaque fin d’année, So Foot sort un hors série qui, sous un angle thématique, compile mais également enrichit des articles/entrevues déjà parus.
Cet hiver, après le best of « Culture », « Supporters » ou « Faits divers » des années précédentes, on a donc droit à un spécial « Tactique ». Or, si l’on vante souvent, et à juste titre, le « style » So Foot, à la fois pointu et déconnant, passionné et ironique, avec des sujets sur des joueurs un peu looseux, marginaux ou complétement tarés, avec des coming out footballistiques de cultureux justement, c’est lorsque le magazine s’est consacré au jeu lui-même, en s’intéressant à ses principaux théoriciens, qu’il a réellement laissé son empreinte selon moi.
Ainsi, les entretiens avec Coco Suaudeau, Arrigo Sacchi, Jorge Valdano… ou, à l’autre bout de l’échelle, Raymond Domenech, quel pied bordel ! Ah Raymond… Qui nous explique quel joueur de tête phénoménal peut être… Sydney Govou, et qui insiste, catégorique, sur le fait que seule la volonté sépare Jérémy Toulalan de… Xabi Alonso. On retrouve bien entendu ici ces entretiens in extenso, souvent agrémentés de nouvelles photos et de leurs désormais quasiment mythiques légendes rigolotes.

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Parmi les « inédits » de ce best of, quelques extraits de causerie d’avant-match : celle, très dispensable puisque tout le monde la connait par cœur, d’Aimé Jacquet pendant la coupe du monde 98 (celle où il demande à Pirès de « muscler son jeu »), celle de Luis Aragones avant la finale de l’Euro 2008 où il suggère à ses joueurs de faire dégoupiller Schweinteinsger (qui ne prendra même pas un jaune au final), celle, superbe, de Guardiola avant le ArsenalBayern Munich de l’an dernier (2-0 pour les würste).

Et puis il y a celle, totalement hallucinante, de Mourinho avant le BarcaReal de la demi-finale retour de ligue des champions 2011. M’en suis toujours pas remis et je ne résiste pas à l’envie de la retranscrire ici. Pour rappel, le Real a perdu le mach aller 2-0 à Bernabeu :

« On va faire un match tranquille. On va les attendre. Il faut défendre près de la surface et maintenir notre bloc très bas pour faire un 0-0. En finissant le match sur ce score là, on pourra accuser les arbitres d’avoir fait basculer la qualification lors du match aller… A Barcelone, nous avons trois options : il y en a deux qui sont impossibles et une seule qui est possible. L’option possible c’est que nous soyons éliminés sur un score serré. L’une des deux options impossibles serait que l’on encaisse une avalanche de buts. C’est quelque chose qu’il faut éviter à tout prix si on veut rejeter la faute sur les arbitres. Il ne faut pas que ça arrive. l’autre option impossible, c’est la qualification. Il faut qu’on essaie de préserver un 0-0 mais si d’aventure on se qualifiait, ça serait parfait. »

(Ah ben ouais, ça serait pas mal ouais. « Si d’aventure ». NON MAIS J’HALLUCINE. Pardon, je te laisse lire tranquille. Mais putain c’est incroyable ce truc).

« Il faut qu’on finisse le match avec le score le plus serré possible afin de rejeter la faute sur les arbitres : c’est notre priorité. Un 2-1, un 1-0, un nul me vont, pour que je puisse dire que les arbitres nous ont volé au Bernabeu. Le Real Madrid a engagé les meilleurs avocats du monde. Je sais de source sûre qu’après les demi-finales, Alves va prendre deux matches de suspension à cause de tout son théâtre et que Busquets va en prendre cinq pour racisme. Et le grand Pep… Il se croit très grand celui-là… Bah il va prendre deux matches de suspension. Peut-être même qu’il va en prendre trois, juste parce que c’est le chef d’une troupe de théâtre. Je peux vous l’assurer. C’est pour cela qu’il faut réussir à finir le match sur un score serré. Si c’est le cas, j’irai en conférence de presse pour dire que nous avons perdu la qualif au Bernabeu. Tous les medias seront avec moi et véhiculeront l’idée qu’on s’est fait voler. En revanche, s’ils nous mettent une correction, on sera la risée du football mondial parce que le lendemain toute la presse dira : « Où sont les arbitres Mourinho? Où sont les arbitres, joueurs du Real Madrid? » On doit lutter pour montrer à tout le monde le vrai visage d’une troupe qui se targue de produire du beau jeu. Il faut qu’on lutte pour que la terre entière sache que ces beaux garçons du monde du football jouent de manière sale, parce que c’est réellement ce qu’ils font. Regardez Alves, Busquets… Comment peut-on démontrer qu’ils jouent salement? En finissant le match sur un score serré. »

On sait Mourinho paranoïaque et mesquin devant les medias. On pense qu’il joue un rôle, qu’il y a là du second degré, une certaine distance ironique, que c’est en grande partie de la comédie. En fait pas du tout : il est sans doute encore pire en privé et avec ses joueurs.

Carletto, je t’aime.

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