Top albums 2018 – 1ère partie

Pour commencer, je vais en remettre une couche sur ma grande découverte de l’année, celle des merveilleux popeux italiens de Fitness Forever: c’est leurs 3 albums que j’ai le plus écouté cette année. Énorme révélation. J’ai toujours pas compris quand le dernier, Tonight, était sorti exactement, il semblerait que ce soit fin 2017 mais si par hasard je me trompais, il faut considérer que c’est lui que je place tout en haut cette année.

Ceci étant clarifié, sur le banc des remplaçants cette année :

Stephen Malkmus & the JicksSparkle Hard

L’homme le plus cool du monde sort un album aussi cool que son précédent et que son prochain. Avec une pochette très cool elle aussi (c’est Cadaqués sur la Costa Brava).

 

BarbagalloDanse dans les ailleurs

Dans la lignée de son précédent, Grand chien, un genre de post-chanson française qui emprunterait aussi bien à la pop, qu’au folk et à la chanson donc.

 

Father John MistyGod’s Favorite Customer

On va finir par y arriver… A aimer sans réticence un album de Father John Misty je veux dire. Quand il s’oublie un peu, et qu’il oublie de faire le mariole, le mec a quand même un sacré talent.

 

Ty SegallFreedom’s Goblin / Fudge Sandwich

6 albums pour Ty Segall cette année : la routine. Freedom’s Goblin est la concrétisation de son travail depuis 2 ans avec son groupe de scène, le Freedom Band : un genre de rock américain total, qui irait des Stooges au Grateful Dead en passant par Neil Young. Parfois pénible, parfois génial.

Le second, Fudge Sandwich lui, est un album de reprises : court, nerveux, sélection impeccable (Lennon, Sparks, Neil Young, Funkadelic), pochette minimalisto-crade réminiscente de ses premiers enregistrements auquel il renvoie incontestablement, rien à dire, c’est du très bon Ty Segall.

 

20 Kurt Vile – Bottle It In

Retour en forme de notre slacker favori avec un album plus kurtvilien que nature (le mec est devenu un genre à lui tout seul en fait) : des quasi-pop songs ou en tout cas des chansons relativement courtes et accrocheuses alternent avec de longues ruminations acoustiques enfumées. Du Kurt Vile classique donc mais radical, dans un sens comme dans l’autre : les chansons accrocheuses le sont vraiment, les morceaux plus longs/lents sont vraiment très longs/lents aussi (3 titres de 10 minutes quand même). A noter une super reprise de John Prine.

 

19 Flavien Berger – Contre temps

Un peu long peut-être là aussi (pour moi en tout cas) mais c’est bien de s’autoriser ça alors qu’aujourd’hui on donne plutôt dans le 30-35 minutes. Il a des choses à dire/faire ce garçon, c’est évident, et il les dit/fait bien. J’aime particulièrement les titres les plus alanguis (Intersaison, Pamplemousse), sur lesquels il se fait presque crooner electro improbable.

 

18 Foxwarren

C’est le projet « groupe » du talentueux Andy Shauf (à gauche sur la pochette) dont l’album The Party a été justement salué il y a 2 ans. C’est un peu plus musclé, un peu plus « groupe » que ce qu’il fait en solo. Normal. C’est très bien mais je trouve ça un peu trop linéaire, un peu trop sur le même mode hyper-mélancolique, voire morose, et ça finit par me plomber. On compare souvent, et à juste titre, Andy Shauf à Elliott Smith, mais ce dernier savait régulièrement faire entrer la lumière et varier les tempos. Shauf est à la limite de la complaisance selon moi. Ou alors il va vraiment pas bien ce garçon et il faut lui offrir un chien, un abonnement à la salle de sport, l’intégrale Will Ferrell, je sais pas, il faut faire quelque chose.

 

17 Tahiti 80 – The Sunshine Beat, vol. 1

Porté par d’excellents singles, et notamment un irrésistible Sound Museum, un album simple, frais, pop comme sa pochette et son titre l’indiquent. L’air de rien, ça fait 20 ans que ces types sont là et bien là. Encore une fois, ce titre là, quelle merveille nom de Dieu !

 

16 The Coral – Move Through the Dawn

Sans doute l’album le plus accessible et le plus upbeat des 6 de Hoylake. Sans doute le plus faible également : le groupe a quand même perdu en finesse avec le départ de Bill Ryder-Jones, il faut bien l’avouer… Mais il a désormais trouvé un second souffle et une seconde jeunesse semble-t-il, dans un style toujours aussi rétro mais plus psyché, un peu plus heavy également. Ils paraissent revigorés, plein d’énergie. Bilan, y a quand même 3-4 grosses tueries sur cet album.

 

15 Ty Segall and White Fence – Joy

Il y a 6 ans, Ty Segall et Tim Presley aka White Fence, une autre figure de la scène garage-psyché californienne, signaient Hair, une véritable tuerie garage-psyché californienne. Joy, est plus tordu, moins immédiat mais il y a dans ses 15 titres en 30 petites minutes plus d’idées et de fulgurances que dans les discographies complètes de bien des groupes. Sur la pochette, Ty et Tim posent avec leur animal domestique respectif et ça c’est trop mims.

 

14 Richard Swift – The Hex

Pas son meilleur mais cet album posthume est surtout l’occasion d’évoquer un auteur-compositeur-interprète et, de plus en plus, producteur ces dernières années, que j’affectionnais particulièrement et qui nous a quitté début juillet dans une relative indifférence. D’autant qu’il est difficile de juger un album posthume : jusqu’à quel point était-il achevé ? L’artiste concerné aurait-il réellement souhaité qu’il soit publié ? etc. En l’état, The Hex n’est donc sans doute pas le meilleur album de Richard Swift mais il offre un bel aperçu de son immense talent, et de ce qu’il aurait été capable de nous offrir si son alcoolisme et le système de santé américain l’y avaient autorisé (les soins qu’il nécessitait avaient un tel coût qu’il n’a pas pu être soigné comme il aurait dû l’être malgré la campagne de crowdfunding initiée par ses proches; une situation aussi absurde que révoltante malheureusement de plus en plus banale aux Etats-Unis…).

Richard Swift était un multi-instrumentiste accompli mais surtout un mélodiste et un songwriter hors-pair. Volontiers nostalgique et maître dans cet art très anglo-saxon de la self-deprecation (l’autodépréciation). Il était très influencé par les ritournelles du music-hall et par les grands songwriters des années 60 : on a souvent évoqué le souvenir de l’immense Harry Nilsson a son sujet et on avait pas tort. Après 2 albums (entre autres) de pure pop dans ce registre là (The Novelist/Walking Without Effort et Dressed Up for the Letdown), sa musique s’est teintée de soul et s’est faite à la fois plus sensuelle et plus retorse. The Hex dévoile tout cela et ouvre même de nouvelles pistes avec un instrumental très cinématographique sans doute influencé par les maîtres français de la composition de musiques de films. Ce devait être l’album de son retour au premier plan après plusieurs années passées en tant que musicien de tournée (les Shins, les Black Keys) ou producteur (le premier et génial album de Foxygen par exemple, c’est lui). Quel gâchis…

 

13 Parcels

Voici un disque, et plus généralement une musique, que je qualifierais de « 2ème génération »: c’est à peu de choses près la même chose que le suivant (ci-dessous), à savoir du soft/yacht rock über Californien, à la grande différence près que les Parcels ne s’abreuvent pas à la source (Steely Dan, Hall & Oates etc) mais à la réinterprétation qu’ont pu en faire Daft Punk sur Random Access Memory ou Metronomy à ses débuts. Ceci étant, c’est vraiment super efficace et très bien fichu. Il y a en outre une unité, une continuité qui fait de cet album une sorte de voyage (bon, la pochette est suffisamment explicite) et le hisse au-delà de la simple collection de tubes funkysant. Et puis les mecs parviennent à nous faire oublier leurs tronches de hipsters ultimate infinity, et ça c’est costaud.

12 Young Gun Silver Fox – AM Waves

Activiste pop bien connu de ceux qui savent (il est par exemple présent sur la compilation des 20 ans de Tricatel), Shawn Lee a toujours 15 projets en parallèle, dans des styles souvent très différents. Sur ce projet, il s’est allié au jeune Andy Platts (le young gun donc, alors que lui et ses longs cheveux blancs sont le silver fox) pour un album 100% Calif’, 100% yacht rock, 100% plaisir : un « simple » exercice de style diront certains, qui souffle sur les cendres de Steely Dan, Hall & Oates, Robin Dupree etc mais qui 1. le fait de manière bluffante et surtout 2. comme toujours en pareil cas, les chansons, les chansons, LES CHANSONS, qui exonèrent l’entreprise de toute accusation de plagiat, pastiche etc. Grösse, ÉNORME régalade.

 

11 Spiritualized – And Nothing Hurt

Au bout du compte, la grande prouesse de Jason Pierce, de même que sa signature, aura été de créer une musique à la fois minimaliste et maximaliste : minimaliste dans ses inspirations, ses mots, ses thématiques, maximaliste dans sa forme (le plus souvent). Tout ça pour dire que And nothing hurt est une énième variation space-gospel sur la rédemption, l’addiction (aux substances, à l’amour), la foi (au sens large), la Vie, la Mort. Qu’est-ce qui fait de cet album sans doute son meilleur depuis 15 ans: difficile à dire car c’est, je me répète, le même que les précédents…

Tame Impala – Le Bikini, Toulouse

Le groupe qui a eu les honneurs de la 1ère place du top 2012 de Grande remise (ils en étaient très fiers m’a-t-on dit) allait-il se hisser sur scène à la hauteur de ses performances en studio ? Julien Barbagallo, le batteur du groupe et cassoulet pur jus allait il faire honneur à son statut d’enfant prodigue ? Kevin Parker allait-il arpenter la scène pieds nus ou en tongs ?

Autant de questions auxquelles je vais tout de suite apporter une réponse. Comme Jeff Copé: sans langue de bois.

1ère partie assurée par les locaux de Dunst !  Pratiquement rien vu d’eux car la chaleur est déjà intenable dans un Bikini pourtant à moitié vide : c’est pas que l’affluence soit faible, c’est que l’autre moitié préfère prendre le peu d’air frais qui circule à l’extérieur, autour de la piscine. Je suis pas contrariant, je suis le mouvement donc Dunst !, désolé les mecs mais ça sera pas pour ce soir.

J’essaie durant l’entracte de me faire violence pour trouver un coin potable me permettant de bien profiter de ce concert que j’attends impatiemment depuis longtemps. La chaleur est VRAIMENT intenable : une fois la salle (très) remplie, je vais littéralement me liquéfier durant 1h30 (Kevin Parker dira d’ailleurs qu’il n’avait pas eu aussi chaud depuis son départ d’Australie).

Le groupe semble avoir pitié de nous et prend la scène assez rapidement. Ouverture (très) progressive sur Why won’t you make up your mind ?: une boucherie. Bah, c’est pas la peine de tourner autour du pot hein: le groupe fait illico honneur à sa réputation grandissante en live et forcément, dans une salle-studio comme le Bikini, c’est une tuerie immédiate. Les nappes de synthés et les textures si particulières de la Rickenbacker de Parker et de son-comparse-qu-on-s-en-fout-comment-il-s-appelle sont restituées à merveille et le son du groupe bénéficie clairement de la dynamique d’un vrai batteur. Seul petit bémol : ça manquait un poil de basse parfois (sur Feels like we only go backwards notamment, mais sur Elephant par exemple, c’était énorme).

Si le concert est d’emblée excellent, il décolle véritablement pour moi à partir de Solitude Is Bliss, que le public accueille avec tout l’enthousiasme qu’il mérite. « There’s a party in my head and no one is invited ». Décuplée par la puissance de projections video hautement lysergiques, la musique de Tame Impala est plus immersive et psychédélique que jamais. Très attendu lui aussi en ce qui me concerne, Half Full Glass of Wine est joué au milieu du set et non en rappel comme je l’imaginais : dantesque. La preuve right here, right now.

Il ne faut pas écarter l'hypothèse que ces jeunes aient pris de la drogue au moins une fois dans leur vie
Il ne faut pas écarter l’hypothèse que ces jeunes aient pris de la drogue au moins une fois dans leur vie

La setlist déroule sans fausse note les meilleurs titres du groupe qui fait preuve d’une maîtrise assez hallucinante (seul manquera à l’appel Desire Be Desire Go, petit regret perso), plus 2 jams absolument délicieuses : l’une plutôt funky, l’autre très planante. Tame Impala construit ses morceaux et varie les tempos à merveille : gros frisson de plaisir sur Mind Mischief où le riff est constamment et imperceptiblement accéléré ou ralenti. Ils quittent la scène sur un Apocalypse Dreams absolument sublime, aussi épique et grandiose que son titre le suggère.

Alors pour répondre aux questions (Grande remise, le blog qui ne prend pas ses lecteurs pour des jambons)

– oui, mille fois oui.

– Trop mignon, Kevin Parker nous explique que cette date est très spéciale pour eux pour cette raison bien précise ; que Barbagallo les tanne avec Toulouse depuis des mois et qu’ils sont super contents d’être là. Au-delà du discours démago de circonstance, le groupe a l’air effectivement très content ce soir. Pour marquer définitivement le coup, le fils prodigue revient sur scène revêtu du maillot du Téfécé période Gignac pour le rappel. Il avait d’ailleurs enregistré un hymne à la gloire du club du temps où il sévissait sous le pseudo Le Cube (ce clip détient énormément d’informations…). Et dire que ce petit branleur, je le croisais encore dans le public de tous les concerts auxquels j’assistais il n’y a pas très longtemps… Aujourd’hui il compte Burgalat, Mehdi Zannad, Tahiti 80 et une tournée mondiale avec Tame Impala à son palmarès. Bravo à lui, il le mérite, c’est un fantastique batteur.

– Je sais pas, je voyais pas de là où j’étais.

A+ les chouchous