#90 T-Rex: The Slider


Quand il faut n’en retenir qu’un, il s’agit très souvent d’Electric Warrior. Ca se tient, c’est un excellent album, le premier véritablement glam de T-Rex, et il contient 2 de leurs tubes les plus connus, Get it on et Life’s a gas. Ceci étant, on retrouve ici Metal Guru et Telegram Sam qui dans le genre gros tubes se posent un peu là (peu de passages musicaux me mettent autant en joie que les couplets de Telegram Sam).

Electric Warrior est super mais je lui préfère son successeur car c’est selon moi leur album le plus homogène et surtout celui qui capte le mieux le « son » T-Rex, à la fois simple, pur et puissant : une batterie lourde et aérienne, des guitares sèches d’une limpidité dingue, une guitare électrique de faune en rut, quelques cordes, des chœurs un brin hystériques. Il faut ici saluer le travail de l’immense Tony Visconti, qui aura donc enregistré les 2 artistes les plus emblématiques du glam-rock, David Bowie et Marc Bolan, sans que leurs albums sonnent de la même manière. Du grand art.

Moins intellectualisél, littéraire et théâtral que celui de Bowie, le glam-rock de T-Rex, qu’il soit boogie lubrique ou folk sentimental, est profondément enfantin (mais pas puéril pour autant). Il retranscrit comme peu d’autres la joie, la tristesse, le sentiment amoureux (ou plutôt le désir) dans ce qu’ils ont de plus pur et d’essentiel: « I’m just a man / I understand the wind and all the things that make the children cry » sur Spaceball Ricochet. Il a été réhabilité depuis (n’oublions pas que T-Rex a longtemps été méprisé, et l’est encore parfois, car jugé comme un groupe pour jeunes ados) mais il faut dire, et redire que Marc Bolan était un parolier brillant, aux visions poétiques naïves et ludiques.

Django Unchained – critique

Je ne vais pas comme le font certains réécrire l’histoire et faire mon blasé : Tarantino a beaucoup compté dans ma formation cinéphilique. Même si je ne me considère pas comme un cinéphile mais c’est une autre histoire, je simplifie.

J’avais 19 ans à la sortie de Reservoir Dogs, c’est l’âge parfait pour découvrir les films de QT selon moi. C’est un âge en tout cas où il peut marquer durablement. De la même manière que Beck a décoincé ma discographie de péteux indie-pop en lui apprenant à bouger son petit cul, il m’a montré qu’on pouvait être cinéphile ET fun, qu’on pouvait aimer Truffaut ET Corbucci, Godard ET Argento, mieux, qu’on pouvait les faire cohabiter harmonieusement dans le même film.

Après, c’est la sempiternelle rengaine de la création originale passée au filtre contemporain: ne jamais avoir écouté Eddie Cochran quand on adore T-Rex, c’est dommage mais ça ne dévalorise pas le second pour autant ; ne pas connaitre tous les films de la Shaw Brothers ou ceux de Damiani quand on adore Tarantino doit-il forcément être passible de la peine de mort ? Et puis les gens qui connaissent VRAIMENT les films de la Shaw Brothers sont-ils aussi nombreux qu’ils le prétendent ? Je n’en suis pas si sûr.

Bon, tout ça pour dire que j’attends toujours ses films avec une certaine impatience. Là je restais sur 2 relatives déceptions : je n’aime pas beaucoup Boulevard de la Mort que je trouve très intéressant sur un plan théorique mais qui ne me procure tout simplement pas tant de plaisir que ça; Inglorious Basterds je le trouve bancal : des moments forts mais des moments vraiment faiblards aussi (tout ce qui est français en gros, acteurs et dialogues).

Là déjà j’étais content parce que je suis toujours content de voir un western sur grand écran. Et puis enfin, Tarantino a tourné un western, merde ! Evidemment, rien de plus logique mais ça commençait à se faire attendre. Même si au final, Django Unchained n’est pas SI spaghetti que ça : te laisse pas impressionner par les petits malins habituels qui feront la fine bouche en te citant Le Dernier Jour de la Colère ou Le Dollar Troué, Django doit autant, sinon plus à la blaxpoitation qu’aux spaghetti et son héros doit lui beaucoup plus à John Shaft qu’au personnage interprété à l’origine par Franco Nero par exemple.

django-unchained
Tout ça pour dire, bis, que j’ai adoré. J’ai non seulement pris un plaisir énorme mais je trouve le film passionnant.

La première partie, la partie buddy movie si je puis dire, régale sans interruption : c’est un best of du meilleur de la crème que ce qu’on aime chez Tarantino. Vais pas faire l’inventaire, suffit de la voir.

La rencontre avec l’ancien second rôle de Quoi de neuf docteur ? marque une rupture assez nette : Tarantino y fait passer son « message » avec une conviction et une maestria admirables lors de 2 scènes à la violence difficilement supportables (le combat de mandingos et les chiens). C’est à partir de là que le projet Django Unchained prend tout son sens et corrige les erreurs d’Inglorious Basterds : réécrire l’Histoire en racontant une histoire mais surtout avec des personnages incarnés (chose qui faisait selon moi défaut à Mélanie Laurent… outre le talent je veux dire). Peut-être Tarantino lui-même a-t-il eu davantage de conviction et d’engagement dans ce projet-ci, tant l’Histoire et la culture black, on le sait, lui tiennent à cœur… Bref, c’est magnifique. Et c’est d’autant plus magnifique que pour ce faire, il utilise uniquement les armes qu’on lui connait depuis le début : la violence graphique et des dialogues superlatifs. Il joue ici merveilleusement des différents registres de langages, accents et intonations en cours à l’époque : anglais Vieille Europe du fancypants Dr Schultz, faconde Sudiste des planteurs (Don Johnson, génial, Di Caprio… génial lui aussi, comme toujours), anglais vernaculaire des esclaves. C’est brillant. Plus que jamais, les dialogues sont le cœur du film, son cœur et son cerveau.

En corollaire, chose déjà abordée dans Inglorious Basterds et même Boulevard de la Mort (via le personnage de Kurt Russell), les protagonistes prennent un malin plaisir à JOUER des personnages, afin de mieux arriver à leur fin. Ainsi, au terme de son périple, Django est devenu le Nègre Vengeur, un quasi-super héros et en tout cas un pur personnage de fiction.

La scène finale retranscrit merveilleusement cela : avant de partir avec sa belle, le héros effectue une parade sur son cheval, plein écran. Pour elle ? C’est ce que le premier champ-contrechamp laisse entendre. Mais quand on revient puis s’attarde un peu sur Django, la caméra effectue un léger mouvement qui révèle Broomhilda sur le côté : la parade nous était adressée à nous, spectateurs. Super Django peut maintenant partir vers de nouvelles aventures. Fuck yeah Quentin !