Vice – critique

Fin connaisseur des arcanes de la politique américaine, Dick Cheney a réussi, sans faire de bruit, à se faire élire vice-président aux côtés de George W. Bush. Devenu l’homme le plus puissant du pays, il a largement contribué à imposer un nouvel ordre mondial dont on sent encore les conséquences aujourd’hui… (Allociné)

En retraçant la trajectoire politique de Dick Cheney au cours de la fin du XXème siècle, Vice s’attache à démontrer comment le 11 septembre 2001 a été ce point de bascule qui a permis à une poignée de fdp (pardon mais difficile de le formuler autrement) de légitimer des lois et actions liberticides, en contribuant à modeler notre (dés)équilibre géopolitique actuel, tout en s’en mettant plein les fouilles pour faire bonne mesure. Dick Cheney donc, mais aussi Donald Rumsfled, Karl Rove, Paul Wolfowitz et quelques autres, soit la garde rapprochée d’un George W. Bush plus dépassé et instrumentalisé que véritablement incompétent.

Tout ça, quiconque ayant vécu les événements décrits dans le film, le savait déjà : la falsification éhontée de documents afin de prouver la présence (totalement fausse, donc) d’armes de destructions massives en Irak, la hausse spectaculaire de l’action et des profits d’Halliburton, l’entreprise pétrolière donc Cheney est resté PDG malgré son poste de vice-président à la Maison Blanche, les arrestations arbitraires de prétendus terroristes et les actes de torture de l’armée américaine commis à l’encontre de la convention de Genève à Guantanamo (notamment) etc etc on connait.
Une quinzaine d’années après les faits (en gros), les auteurs de Vice ont encore plus de cartouches à mettre dans leur barillet et ils ne s’en privent pas: multiplication des sources, images d’archives, issues notamment du flot ininterrompu des chaînes d’info, reconstitutions, le montage, brillant, créé un tourbillon d’informations très efficace et d’une fluidité remarquable. Le tout avec humour, dans la lignée de shows d’infotainment dont Jon Stewart, Stephen Colbert et John Oliver se sont faits les spécialistes outre-Atlantique (ici on a Yann Barthès). Rien à dire, c’est très efficace et même, pourrait-on dire, brillant (d’ailleurs on le dit volontiers si j’en juge par l’accueil critique, très positif). Vice met également en lumière la ficelle théorique derrière les actes, via le concept d’ «éxécutif unitaire», interprétation subjective de la Constitution américaine utilisée par Cheney et ses sbires, qui n’est ni plus ni moins qu’une légitimation d’un pouvoir tyrannique et dictatorial.

Alors pourquoi je suis pas convaincu?

Je le suis en réalité : Vice est brillant, à la fois drôle, divertissant, bien informé et édifiant. Cette fois, contrairement à The Big Short, Adam McKay trouve la bonne distance et n’est jamais fasciné par son sujet: Cheney et sa clique sont des ordures réactionnaires, le film a beau être régulièrement assez drôle et décrire les faits avec une distance ironique, il ne laisse aucun doute là dessus. En conclusion, la gangrène atteindra jusqu’à la cellule familiale, seule oasis d’humanité préservée durant tout le film (ou presque donc): son plus beau coup de pute, sa crasse la plus immonde, Cheney la réserve à sa propre fille. Révélation divulguée après un très habile montage parallèle entre cette affaire familiale (que je ne dévoilerai pas) et une opération de transplantation cardiaque qui se conclue sur une image concrète et symbolique à la fois, celle d’un cœur mort. C’est sans appel.

Mais alors, qu’est-ce qui cloche bon sang d’une pipe en bois?

« C’est pas toi, c’est moi »: j’en ai tout petit peu ras le cul de ces films de monteur. Ca me fatigue, tout simplement. Voix off, images arrêtés sur voix off, inserts, images d’archives, faux générique de fin, vrai générique de fin méta etc etc. Ca me fatigue. Des «films de monteur», ou un «style Scorsesien», peu importe comment on le nomme. Ca me fatigue et je trouve ça un peu ringard en vérité, un peu dépassé en 2018. Bon, c’est personnel.

Autre chose: c’est un détail mais, et même si l’énergie du film parviennent à le faire oublier, j’ai mis du temps à passer outre les maquillages et postiches dont sont affublés tous les acteurs du film: Steve Carell 57 ans, et qui interprète Donald Rumsfeld, est censé avoir 40 ans, voire un peu moins lors de sa 1ère apparition à l’écran, puis 70 à la fin du film. Christian Bale, 45 ans, interprète de Dick Cheney donc, a moins de 30 ans lors de son arrivée à Washington. Quelques scènes nous le montrent même alors qu’il était étudiant, dans sa vingtaine donc. Idem pour Amy Adams (qui interprète la femme de Cheney).

Là il est censé avoir 30 ans par exemple.

C’est sans doute futile mais ça m’a gêné. Evidemment, si le film m’avait totalement emballé, je serais passé outre mais tu sais ce que c’est, quand on ne l’est pas (emballé), on a tendance à bloquer sur le moindre détail.

Et puis quelque part, ça m’emmerde un peu qu’Adam MacKay soit devenu un cinéaste mainstream. OK, il a le bon goût de garder une certaine impertinence et de ne pas avoir fait son Tchao Pantin (pourvu que ça dure…) mais il aura beau récolter les lauriers de la critique, du public, des Oscars (Vice a obtenu 8 nominations et il fait un candidat aussi sérieux que légitime), il restera toujours pour moi le binôme de Will Ferrell et l’immortel auteur d’Anchorman, de Talladega Nights et de Frangins malgré eux.

Enfin, malgré ça et malgré tout (ma relative lassitude voire mon agacement ponctuel face à des procédés de mise en scène décrits plus hauts), c’est un film que je recommande.

Top 2014 – cinéma – j’ai aimé – 1ère partie

J’ai aimé nettement plus de films en fait. Numbers don’t lie (37 vs. 14). Et après on dit que je suis méchant, aigri et j’en passe. C’est vous les méchants. Vous, les ronds de cuir.

Ici donc, des films parfois plus mauvais que ceux de mon billet précédent mais que j’ai aimés. A l’inverse, certains sont peut-être meilleurs que ceux de mont top 10 mais je les ai « juste » aimés.
Je découpe en 2 parties sinon ça va faire un gros pavé indigeste. Comme ça ça fera 2 petits pavés indigestes. Plus le top 10.

37. Fiston

Mauvais bien sûr (Kev Adams + Frank Dubosc, un genre de cauchemar absolu) mais pas catastrophique. Disons qu’y a 2-3 vannes… Disons que j’étais bien luné… Disons que jesuistropbonclientpourcegenredefilms. A noter Helena Noguerra dans un rôle de pure MILF, preuve que le temps passe pour tout le monde.

 

36. Prêt à tout

Je garde un très bon souvenir des Gamins, le « premier » film de Max Boublil. J’étais donc relativement motivé (au sens où j’avais davantage envie de le voir que, mettons, Winter Sleep). C’est pas nul mais c’est beaucoup plus sage, avec des situations, des gags plus convenus et traités de manière nettement moins audacieuse. Y a de bons passages quand même, c’est sympathique. Je dis toujours la même chose, d’ailleurs je l’ai redit pas plus tard que juste au-dessus mais c’est tellement ça que je vais le reredire encore une fois : je suis trop bon client pour ce genre de films.

Sooouuuuuuuuuuuuus le sol-ei-ei-ei-ei-ei-eil
Sooouuuuuuuuuuuuus le sol-ei-ei-ei-ei-ei-eil


35. Le crocodile du Botswanga

Bah ouais : vu un peu en désespoir de cause sur la foi d’un simili pseudo avis vaguement positif et en fait je me suis bien marré. N’Gijol, que je trouve médiocre en stand up, a quand même un abattage assez formidable dans son rôle de dictateur de république bananière. Nan sérieux, c’est pas mal…

 

34. Fast Life

Et du coup je suis allé voir son film à lui (à Thomas N’Gijol). C’est pas un « bon » film non plus évidemment mais ça se démarque clairement des comédies que le cinéma français nous pond au kilomètre (et dont je suis parfois client, voir ci-dessus mais c’est pas le problème). N’Gijol a une grosse qualité selon moi, LA qualité essentielle à un bon comique même: il n’a pas peur du ridicule, ni d’endosser le mauvais rôle. Pas dans une posture auto-dépréciative « sacrificielle » et narcissique qui créerait l’empathie : non, ici il joue un vrai connard, irrécupérable. Ca me fait penser à ces mots très justes du grand Chris Esquerre qui disait que la majorité des comiques français se donnaient toujours le beau rôle au fond, ne voulaient pas passer pour des blaireaux, qu’ils se prenaient pour des rocks stars alors que l’essence même du comique, c’est le ridicule (et ne pas en avoir peur donc). Eh bien Thomas N’Gijol a au moins ce mérite de pratiquer son art sans se brosser ni lui ni son public dans le sens du poil pour s’attirer ses faveurs (au public). Je me suis perdu dans cette dernière phrase.

Là pour le coup il est pas mal Olivier Marchal
Là pour le coup il est pas mal Olivier Marchal

 

33. Dragons 2

Très fan du 1er, que j’ai d’ailleurs revu avec grand plaisir. Celui-ci tombe dans le piège classique des suites en rajoutant beaucoup trop de tout : de spectaculaire, de personnages, de blagues, de sentiments et enfin de minutes (une grosse vingtaine à sabrer ici). A mi-parcours néanmoins, il se passe un truc assez étonnant (que je ne dévoilerai évidemment pas) et consécutivement, le traitement appliqué à la description du couple et de la cellule familiale prouve que les auteurs sont quand même un peu au-dessus de la mêlée. Visuellement et plastiquement, c’est une merveille.

 

32. Des lendemains qui chantent

Très sympathique ce film. Ici.

 

31. Situation amoureuse : c’est compliqué

J’ai dit et redit tout le bien que je pensais, que je pense toujours d’ailleurs, de Radiostars, petit jalon de la neo-comédie française. On a ici affaire à la même équipe, à la différence que Romain Lévy, son réalisateur, se contente de l’écriture et d’un bref second rôle, Manu Payet assumant un vrai premier rôle (Radiostars était un film de bande) ainsi que la réalisation. Et c’est vraiment pas mal. Moins potache, plus mélancolique, avec de vrais bons passages de comédie et de « romance » à la fois. Et surtout, surtout, le génial Jean-François Cayret (le mec qui veut être surclassé dans la pub Volkswagen) dans un rôle bien écrit à la base mais dans lequel il crève l’écran.

 

30. Sin City 2

Pas du tout envie de le voir à la base et puis je l’ai chopé un peu par hasard et finalement j’ai passé un très bon moment. Une pure série B, ni plus ni moins, qui connait ses limites mais remplit parfaitement son cahier des charges. Eva Green y est biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip, ce qui ne gâche rien.

Biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip
Biiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiip

 

29. Anchorman 2

Si un jour je fais un top comédies sur le modèle de mon top 100 musique (faudrait que je me retrouve au chômage pour ça mais bon), Anchorman (Présentateur vedette : la légende de Ron Burgundy) sera très très haut. C’est avec Dumb and Dumber, Supergrave et 40 ans, toujours puceau, une de mes comédies préférées de ces 20 dernières années et un des sommets de la geste willferrellienne, ce génie absolue de l’humour. J’étais bien sûr hyper content qu’une suite lui soit donnée même si un peu craintif en même temps. Pas de surprise :  j’ai ri, beaucoup parfois, mais c’est nettement moins bien que le 1er volet. C’est beaucoup trop long surtout : passée la 1ère heure, extra, ça s’étire beaucoup, beaucoup trop. Évidemment, le challenge était de taille : comment donner une suite digne de ce nom à une comédie culte ? La réponse plus loin dans mon top.

 

28. Les contes de la princesse Kagoya

Je vois que le film est très bien classé dans pas mal de tops de fins d’année et c’est mérité. Formellement c’est une merveille et quelques séquences impriment durablement la rétine. L’histoire, basée sur une légende populaire, est touchante. « Alors quoi ? » Alors je m’y suis un peu fait chier…

C'est beau.
C’est beau.


27. L’Homme qu’on aimait trop

Du Téchiné pur jus : à la fois cossu et singulier, bourgeois et personnel. Le fait divers qui préside au film aurait pu être traité de manière totalement différente, en se focalisant uniquement sur l’un ou l’autre des 2 personnages principaux :  Téchiné y ajoute même un 3ème (celui de Catherine Deneuve) et parvient à ménager un espace à tout le monde sans que son film paraisse jamais bancal ni tiède. Je le redis là aussi encore une fois : dans un rôle bien écrit, Guillaume Canet est un putain de bon acteur.

 

26. Saint Laurent

Je suis pas totalement convaincu mais la 1ère partie, avec les scènes de boîte et les tubes de Northern Soul, ainsi que la fin, avec cette idée géniale d’utiliser Helmut Berger pour jouer Saint Laurent vieux, m’ont emballé. On peut légitimement trouver ça poseur, prétentieux, que sais-je encore mais il me parait difficile de ne pas concéder que Bonnello fait du cinéma.

 

25. Pas son genre

Ca frise le très bon FF (Film Français) mais c’est pas tout ça fait ça : la faute au désormais habituel didactisme de Lucas Belvaux. Il a l’air adorable ce garçon, très intelligent, très sensible mais il doit être un tout petit peu chiant quand même. Le genre, au cours d’une soirée, à te coincer pendant 2h dans un coin de la pièce pour une discussion interminable sur la fin des idéaux de gauche, quand tout le monde est en train de se mettre minable sur Big Bisou. Bon, c’est quand même un très JF (Joli Film, j’essaierai d’en donner la définition à l’occasion) à la fois très léger et très grave puisque ça laisse un sale goût amer dans la bouche. Difficile enfin de ne pas avoir un mot pour Emilie Dequenne qui emporte tout et tout le monde sur son passage, et ce mot c’est « irrésistible ».

300143
Petit chou ❤


24. La chambre bleue

J’ai l’impression qu’à moins de s’appeler Luc Besson, il est très difficile de rater l’adaptation d’un récit de Simenon. Alors quand on s’appelle Mathieu Amalric forcément… Non pas que je le considère comme un génie mais bon, tu vois l’idée. C’est donc une réussite, proche de ce qu’à pu faire Chabrol dans ses dernières années, avec un soupçon d’érotisme estival en plus.