Song to Song – critique

Une histoire d’amour moderne, sur la scène musicale d’Austin au Texas, deux couples – d’un côté Faye et le chanteur BV, et de l’autre un magnat de l’industrie musicale et une serveuse – voient leurs destins et leurs amours se mêler, alors que chacun cherche le succès dans cet univers rock’n’roll fait de séduction et de trahison. (Allociné)

Je pensais faire un break mais là c’est pas possible, ça me démangeait trop.

D’un côté Rooney Mara et Ryan Gosling, de l’autre Michael Fassbender et Natalie Portman. Les 2 premiers sont des artistes: elle gratouille sur scène avec les Black Lips (sans déconner), lui a des chaussures complètement pourries. Elle a même un énorme portrait d’Arthur Rimbaud chez elle, c’est pour te dire. Fassbender en revanche est un gros enculé: ses chaussures sont impeccables. Il a du bagout, des fringues super classe, du pognon à plus savoir quoi en faire.

La Portman apparaît seulement au bout d’une grosse demi-heure et Fassbender tombe immédiatement sous le charme. Elle dit être instit mais ne pas avoir trouvé de boulot (ah bon), donc elle est serveuse. Fassbender fait tout pour qu’elle se fasse virer car il veut s’occuper d’elle, il est complètement libre dans sa tête le mec.
En réalité c’est un producteur méphistophélique et il veux travailler avec Ryan Gosling. Qui sort avec Rooney Mara qui elle couche en même temps avec Fassbender (ou couchait? Je sais pas et je m’en fous).
A un moment on les voit tous les 3 durant un voyage au Mexique. C’est super le Mexique, les gens y sont tellement plus authentiques, tellement plus proches des vraies valeurs. Et puis la tequila y est tellement pas chère, franchement, c’est abusé comment c’est pas cher de se mettre une race là bas !

Bon, c’est horrible. Mais vraiment. Horrible à un point tel, et c’est bien ça le plus horrible, que t’en viens à douter de la beauté et de la fulgurance des premiers films de Malick (les 4 premiers, jusqu’au Nouveau Monde inclus). Je te jure, j’ai presque peur de revoir Les Moissons du ciel maintenant…

On retrouve donc tout ce qui fait son cinéma depuis Tree of life: la voix off quasi exclusive, le montage, les « moments », plus que les séquences ou même les scènes, les peaux, les mains, les nuques (nom de Dieu de bordel de merde, j’ai jamais vu autant de nuques dans un seul film) et les pseudo-aphorismes atterrants mi-poésie (de merde) mi-discours signifiant de pubard (de merde) :

« I love your soul » évidemment, la base (« beautiful soul », équivalent anglo-saxon de notre « belle personne »)
« Mama, you gave us so much »
« Scare me… come closer »
etc etc etc. Y a que ça en fait, toujours en voix off donc.
A un moment, Rooney Mara minaude et se roule dans un rideau, on jurerait une pub. Ces pubs qui s’inspirent du cinéma de Malick, et qu’il a fini par réaliser lui-même (le truc avec Angelina Jolie là, qui a dû coûter plus cher que La Ligne rouge et Le Nouveau monde réunis). Ca pourrait durer 10 minutes ou 4 heures, ça serait pareil.
Un peu après la scène du rideau, Rooney Mara, toujours elle, ou plutôt sa voix off, dit « I love pain. It means life ». J’ai éclaté de rire. Oui, ça pourrait durer encore 4h comme ça: ça faisait 45 minutes environ, j’ai estimé que c’était déjà trop, j’ai quitté la salle. Pour la 2ème fois de ma vie seulement. Pour un film de Terrence Malick. La tristesse putain…

Joe – critique

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Dans une petite ville du Texas, l’ex-taulard Joe Ransom essaie d’oublier son passé en ayant la vie de monsieur tout-le-monde : le jour, il travaille pour une société d’abattage de bois. La nuit, il boit. Mais le jour où Gary, un gamin de 15 ans arrive en ville, cherchant désespérément un travail pour faire vivre sa famille, Joe voit là l’occasion d’expier ses péchés et de devenir, pour une fois dans sa vie, important pour quelqu’un. Cherchant la rédemption, il va prendre Gary sous son aile… (Allocine.fr)

J’ai trouvé ça très mauvais pour ne pas dire plus.

David Gordon Green s’est fait connaître au début des années 2000 avec une trilogie dont le film le plus remarquable (L’Autre Rive) l’a installé comme numéro 1 indiscutable au classement des wannabe/futurs Terrence Malick. Très beau film âpre et naturaliste. Puis virage à 180° : il s’est acoquiné avec les barons de la neo-comédie US pour une paire de films absolument géniaux (Pineapple Express avec Seth Rogen et James Franco, The Sitter avec Jonah Hill) un ratage total (Votre majesté, très très lourd, malgré Danny McBride et Zooey Deschanel en esclave sexuelle) et de nombreux épisodes de la grandiose série Eastbound and Down (avec Danny McBride encore, sans doute la meilleure comédie vue à la TV depuis The Office UK, pas moins).

Il a opéré une sorte de retour aux sources l’an dernier avec Prince Avalanche (pas folichon mais pas mal. Mais pas folichon), il revient totalement à ses premières amours avec Joe.

Joe avait, sur le papier, absolument tout pour me plaire : la flemme de faire l’article mais en gros, tout ce qui composait également Mud.
Mais ici, rien ne fonctionne selon moi : l’intrigue est trop distendue, manque de romanesque et surtout, surtout, le film semble accumuler absolument tous les clichés de l’americana de manière grotesque. A ce stade, la question de la vraisemblance ou du réalisme n’a plus vraiment de pertinence. Tout ici respire la glauquitude, la crasse, les bas fonds de l’humanité. Aucune respiration. Pourquoi pas, n’est-ce pas ? C’est un choix. Le problème c’est que David Gordon Green filme tout ça sans aucun recul, avec une certaine complaisance même. La scène où Joe (un Nicolas Cage tout en implants capillaires ET visagaux) se rend furibard au bordel, mon Dieu… Comment peut-on écrire et filmer une telle scène au premier degré ? Inadmissib’.

La relation filiale que Joe tisse avec Gary (un Tye Sheridan moins poupon et plus hormonal que dans Mud) ne suscite aucune émotion. Et cette conclusion sur le mode « the circle of life »…

J’espère que David Gordon Green va rapidement refaire une incursion du côté de la comédie, ça lui va finalement beaucoup mieux.